Le Briquebuster de l'hiver
Un film dérivé d’une grande marque de jouets co-produit par celle-ci n’inspire en général que mépris de la part du cinéphile , on soupire d’autant plus à la vision de labande-annonce qui presente un méchant semblant incarner les grandes corporations dans un tel contexte. Et pourtant il arrive que des miracles se produisent surtout quand on vous confiez l’entreprise au frappadingue duo Phil Lord et Chris Miller déjà auteur d’un des films d’animation les plus innovants de ces dernières années avec "Tempêtes de boulettes géantes" et qui avaient relevé le défi de faire un succès de l’adaptation d’une série moisie des années 90 "21 jump Street"…
Parfois de grands concepts et des histoires passionnantes arrivent mort-nés à l’écran dans des adaptations inertes, Lord et Miller , eux, parviennent à partir d’un jeu sans narration propre à construire une véritable aventure qui réunit toutes les générations dans une célébration drôle et colorée de l’imagination et fait du caractère transgénérationnel le moteur de son histoire.
Le film se moque autant qu’il ne célèbre le fameux mono-mythe de Joseph Campbell base de quasiment toutes les grandes sagas cinématographiques depuis 30 ans (sagas qui bénéficient quasiment toutes d’un clin d’œil au cours du film) . L’ "élu" destiné à sauver le monde des plans du maléfique Lord Business (Will Ferrell) est ici Emmett (Chris Pratt) un Lego tout ce qu’il y a de plus ordinaire qui au contact de Wyldstyle (Elizabeth Banks) va découvrir un univers caché, celui des "master builders" et se voir révéler son destin par un mystérieux mentor Vitruvius (Morgan Freeman).Toute ressemblance avec Neo, Trinity et Morpheus est loin d’être fortuite.
Si le ton est résolument humoristique, avec une avalanche de gags que n’auraient pas reniés les ZAZ de la grande d’époque de "Y a t’il un pilote dans l’avion", La Grande Aventure Lego est un véritable film d’action et d’aventures qui offre des scènes massives dignes des meilleurs blockbusters à un rythme effréné.
C’est aussi un tour de force visuel , bien qu’animé en CGI le studio Animal Logic (Babe, Happy Feet) a tenté de capturer un esprit stop-motion en faisant de chaque élément de décors y compris les environnements naturels (eau, feu) une brique existante de Lego. On est littéralement ébloui par des scènes épiques se déroulant sous un ciel ou un océan de briques colorées.
Le film incorpore de nombreux personnages issus de 30 ans de gammes Lego y compris ceux issus de licences d’autres films. On retrouve ainsi de nombreuses "cameos" de personnage célèbres de Gandalf à Shaquille O’Neal (et d’autres dont nous ne révélerons pas ici la présence). Ces apparitions ne fonctionnent pas comme des gadgets tant les créateurs célèbrent la "coolitude" de leurs invités et nous transmettent leur enthousiasme.
La Guest-star la plus choyée , il fait même partie intégrante du casting principal, n’est autre que Batman dont le traitement ravira les fans de comics qui retrouveront une caricature de la version infaillible du personnage telle qu’elle apparaît dans les comics de Grant Morrison ou celui du "All Star Batman" de Frank Miller.
Seul bémol le film ralentit dans sa dernière partie même si ce dernier acte s’articule autour d’une révélation qui donne au film tout son sens.
La bande originale de Mark Mothersbaugh compositeur qui travaille essentiellement pour la télévision est mémorable, elle passe en revue les styles musicaux de 30 ans de blockbusters du western à la techno la encore avec un sourire mais énormément de respect. Il compose par ailleurs avec "Everything is AWESOME" parodie de pop bubblegum abrutissante LA chanson de l’année (même si on y trouve des similarités avec l’ "America Fuck Yeah" du duo Parker et Stone pour "Team America : World Police").
La Grande Aventure Lego est un blockbuster (au sens propre) pour toute la famille, grand spectacle pop et coloré véritable injection de bonne humeur. Une réussite. AWESOME ! 9/10