"Pourquoi la nature lutte-t-elle contre elle-même ?"
Terrence Malick ne filme pas la nature gratuitement, pour faire beau ; son point de vue ne se détache jamais des personnages - il se confond d'ailleurs souvent avec eux. C'est en mêlant une naïveté contemplative merveilleuse (ou comment revenir aux émotions les plus simples et les plus belles - même au sein de l'horreur) et une réelle profondeur du regard (la contemplation soulève sans cesse des questionnements fondamentaux) qu'il parvient à dépeindre une nature aux multiples visages, à la fois hostile et accueillante, cruelle et maternelle.
Pour une fois, l'Homme n'est pas représenté comme opposé à la nature - il y participe pleinement, reflétant sa violence comme ce qu'il y a de plus beau en elle (les esquisses des différents personnages, jamais simplistes, sont toujours justes), et mettant en évidence des problèmes métaphysiques essentiels : pourquoi les hommes s'entretuent-ils s'ils viennent de cette même nature ? Le monde serait-il constitué par plusieurs forces antagonistes plutôt que par une grande force universelle ?...
"La ligne rouge" - œuvre charnelle et minérale - est un film d'une spiritualité résolument terrestre : si c'est la terre qui se voit jonchée de cadavres tout au long du film, c'est aussi d'elle qu'émerge toujours la vie - à l'image de cette arbrisseau naissant dans un paysage d'une sérénité salvatrice.