Mélodrame criminel flamboyant bien qu'en noir et blanc, tourné à Quebec, avec comme cerise sur le gâteau hitchcockien une réflexion éthique à plusieurs bandes.
D'abord, le suspense est original : un prêtre, joué par un très beau Montgomery Clift à l'allure fragile, est accusé du meurtre dont il a reçu la confession par son sacristain.
Cette trame diffuse des interactions psychologiques très subtiles entre les personnages du policier, joué par Karl Malden, du procureur, joué par Brian Aherne, de l' ex-fiancée, jouée par Anne Baxter et de son mari joué par Roger Dann ; ainsi que dans le couple du meurtrier Otto (joué par O.E Hasse) et de sa femme Alma (jouée par Dolly Haas), des émigrés pauvres redevables au prêtre qui les avait recueillis.
L'enchevêtrement des complicités sociales, visibles en superficie, et des rivalités souterraines, révélées par les péripéties successives, est à son maximum d'efficacité dans l'exposition sarcastique de liens qui se déstructurent entre le tueur par accident, son épouse et le prêtre , et dans ceux des notables.
Elle l'est aussi dans le rôle sèchement pointé entre d'une part les phases du procès public et d'autre part la montée haineuse du lynch dans la foule frustrée, privée de ses repères moraux : Hitchcock les décrit alors comme ayant été de simples convenances, des apparences, des faux-semblants de respect envers la prêtrise.
Le développement de l'intrigue, la direction d'acteurs, le rythme, la musique de Bernard Herrmann et les clins d'oeil du maître (cette fois le final est dans une salle des fêtes vide et lumineuse plutôt qu'un théâtre sombre bourré de recoins), tout est hitchcockien comme on l'aime.
Mais il nous laisse aussi apres le mot Fin une reflexion éthique en suspens, de haute volée : la noblesse de respecter le secret de la confession par le prêtre au risque de se perdre lui même est une chose, la responsabilité de ne rien dire et le refus de la délation comme causes de trois meurtres de plus en est une autre.