La Petite Maison de Thé est un film très intéressant, aussi bien pour ses qualités que pour ses défauts.
Commençons par ses derniers.
Le film de Daniel Mann est un bel exemple du withewashing Hollywoodien discuté récemment par rapport au casting de Dr Strange et du remake US de Ghost in the Shell. Ici, c'est Marlon Brando qui s'y colle en jouant le role de Sakini, un okinawaien qui sert d'interprète entre les forces d'occupation et les habitants de l'archipel. Et malgré tout le talent du bonhomme, c'est peu dire que la suspension d'incrédulité a du mal à s'imposer. Surtout quand tous les autres habitants sont des vrais Japonais. Brando a autant de crédibilité que Sean Connery dans On Ne Vit Que Deux Fois sauf qu'ici, il faut avaler la pilule durant tout le film. Sa présence et prestation tirent malheureusement le film vers la parodie involontaire.
Le scénario tombe également régulièrement dans le clichesque, tout particulièrement quand il traite du personnage de la geisha. Evidemment, le film datant de 1956, cette vision parfois franchement caricaturale du Japon par les USA n'est pas surprenante. Mais elle affaiblit le message d'ouverture et de compréhension entre les cultures que porte le film.
La Petite Maison de Thé n'en demeure pas moins une très efficace comédie. Les situations sont bien trouvées et propices à de multiples incompréhensions riches en gags. Les différents acteurs (oui, même Marlon) ont le timing et les attitudes physiques adéquates pour arracher sourires ou franc rires.
Et, si l'on met de côté les facilités dans la description du Japon, le film s'avère une critique absolument passionnante du "nation building". A ce titre, le Japon est le plus brillant exemple d'un tel processus réussi par les USA. Mais, comme on a pu le voir récemment en Afghanistan ou en Irak, la tache n'a rien d'aisée et aboutit le plus souvent à des échecs retentissants. Le film, sous le couvert de la comédie, illustre toute les erreurs qui peuvent être commises par une force d'occupation dans ce registre. Le fait que ces dernières finissent par acheter la paix sociale en promouvant la fabrique d'alcool est particulièrement bien vu quand on sait l'importance que revet le commerce de la drogue dans certaines zones d'influence Américaines et dans les tentatives de "nation building" récentes. Sous cette angle, l'intelligence dont fait preuve le film est tout bonnement remarquable.