La Ruée marque la première vraie collaboration entre Frank Capra et Robert Riskin. Après s'être titillés les années précédentes, pour The Miracle Woman où Capra adapte Riskin et La Blonde platine où Robert était chargé des dialogues, nos deux bonshommes décident d'écrire ensemble un film qui aborde de front la Grande Dépression, chose particulièrement novatrice alors.
La Ruée sera un des premiers films de Capra à donner l'impression qu'il peut courir enfin dans la cour des grands, il lui faudra encore batailler une paire d'années pour ça, mais bon, là au moins, on commence à le remarquer et à le regarder d'un autre œil...
Le film raconte l'histoire d'une banque dirigée par un homme honnête... Déjà, tout de suite, on sent que le conte de fée n'est pas loin, mais bon, passons, d'ailleurs, son conseil d'administration veut le forcer à devenir une ordure comme les autres, un de ses employés s'acoquine avec des brigands et sa propre épouse par-dessus le marché, et une rumeur va mettre en péril l'œuvre de sa vie lors d'une impressionnante ruée petits épargnants qui veulent récupérer leurs billes coûte que coûte ! Une seule solution pour maintenir la banque à flot : réussir à accéder à toutes les demandes et à tenir jusqu'à la fermeture du soir...
Si ce point vous rappelle La Vie est belle, et bien c'est normal, en fait la Ruée est probablement la matrice de la plupart des Capra classiques qui suivront. On y retrouve les idées géniales de montage, même si parfois encore maladroitement dosées, la confiance dans les petits et la dureté de cœur des gros, il y a des acteurs formidables à tous les rôles et des donzelles tout particulièrement agréables à contempler ou à entendre (il faudrait faire une thèse sur les voix féminines dans les films de Capra...)...
Nos deux compères n'ont pas encore pensé à faire tourner leur histoire autour d'un jeune premier génialement joué par Stewart ou Gary, mais on ne s'ennuie pas une seconde, Walter Huston est un héros capraien aussi paternel que gentiment paternaliste, Pat O'Brien arrive tant bien que mal à se faire une petite place en dragouillant Constance Cummings et Gavin Gordon est encore plus répugnant qu'à l'ordinaire, la pauvre Kay Johnson n'a vraiment pas de chance de tomber sur lui comme séducteur de ces dames...
Un joli brouillon de l'œuvre qui suivra, mais un brouillon déjà bien avancé, avec tout ce qui deviendra formidable plus tard avec un peu plus de métier et de soin, et au final, un film mineur bougrement agréable qui se dévore d'autant plus facilement, qu'il ne doit guère dépasser l'heure et quart...