Ce film est né à la suite d'un traumatisme vécu par Billy Wilder, à savoir d'une part à filmer les camps à la fin de la guerre, puis apprendre qu'une partie de sa famille a été décimée dans ces mêmes endroits. C'est sans doute la raison pour laquelle il a voulu revenir à une opérette très en vogue dans sa jeunesse, du temps de l'empire austro-hongrois, genre démodé s'il en est à cette époque.
L'histoire est celle de Bing Crosby, un vendeur itinérant qui veut refourguer ses gramophones à l'empereur autrichien au début du XXe siècle, mais il va rencontrer à la place la comtesse jouée par Joan Fontaine, ainsi que sa chienne. Détail important, car c'est de cet animal que va débuter leur drôle de relation, où les canidés auront leur importance.
A travers ce film musical, le seul de sa carrière, Billy Wilder voulait proposer un film plus léger, éclatant autant que puisse le montrer ce superbe Technicolor, et qui est presque une invitation à un autre monde. Comme le témoigne la superbe scène d'ouverture où Bing Crosby rentre par effraction dans un palais où on voit un bal dansant. Pour cause de censure, il est difficile de parler de mariage ou de termes plus crus, et le génie du réalisateur (ainsi que son coscénariste Charles Brackett) est de faire passer tout cela par les chiens de Crosby et Fontaine, l'un noir et l'autre blanche. On voit même cette dernière allongée sur le divan d'un psy, qui lui fait une analyse !
J'avoue que c'est parfois drôle, mais il ne faut pas être allergique à l'opérette style Francis Lopez, car, personnellement, je trouve ça vraiment ringard, ni au côté kitsch de la décoration et des costumes, même si on sent qu'il y a des moyens.
Au final, Billy Wilder n'aimait pas ce film, à cause des dépassements de budget, puis des rapports difficiles avec Bing Crosby (dont l'alchimie avec Joan Fontaine ne se voit pas à l'écran) ; c'est une œuvre mineure dans sa filmographie, mais je pense que Wilder devait passer par cette légèreté avant d'attaquer les sommets qu'on lui connait.