J'ai eu un peu peur au début. Il faut dire que je n'étais pas dans mon élément habituel, puisque j'ai vu ce film dans une salle "commerciale". Je n'y avais pas mis les pieds depuis une dizaine d'années et j'ignorais, par exemple, que les places y étaient désormais numérotées. Et je ne me souvenais plus que la pub durait aussi longtemps avant que le film ne démarre. Bon, ce n'est pas le sujet ici. Dire ce que j'en pense, de ces salles, prendrait sans doute plus de ligne qu'écrire cette critique. Encore que, quelques expressions bien senties pourraient finalement peut-être suffire...
Oui, j'ai eu peur au début. J'ai d'abord cru que c'était un film comique, dont le ressort aurait reposé sur les blagues vaseuses des pions. Une sorte de remake des "Profs", dans les quartiers dits sensibles. Mais il y avait quand même les réparties des élèves, bien plus drôles à vrai dire, et l'impression de vitalité qui s'en dégageait. Et puis le film bascule, assez vite d'ailleurs, mais sans qu'on s'y attende forcément, avec la première scène de prison. Ouf, me suis-je dit. C'était parti : la chronique d'une année scolaire, alternant moments drôles et moments graves. Proche de la vraie vie et de laquelle l'humanisme de Grand Corps Malade ressort assez fortement.
Je ne vais pas m'étendre ici sur la vie des quartiers ghettoïsés et racisés. Tout le monde sait de quoi il s'agit, même si trop de gens dans ce pays feignent de l'ignorer. Et que plein d'autres sont trop heureux de la diaboliser : ça défoule toujours de taper sur celui qui a une vie plus merdique que la tienne. La force du film, mais je me répète, est de montrer des personnages dans toute leur humanité, avec leurs qualités, leur envie de vivre, mais aussi leurs faiblesses. Et ce n'est pas un voile (ou non) sur la tête des femmes qui va y changer quoi que ce soit, n'en déplaise aux guignols de tout poil...
Enfin, difficile de ne pas voir dans ce film, un hommage anticipé, mais aussi posthume s'agissant de Christine Renon, à tous ces personnels scolaires, qui dans l'indifférence générale, et celle particulièrement prononcée de leur propre administration, se battent contre les vents et marées d'un système politique et économique structurellement et de plus en plus inégalitaire, pour essayer d'assurer leur mission éducative. Pour ceux de mes lecteurs qui ne seraient pas au courant, Christine Renon était une directrice d'école du 93, qui s'est suicidée le 21 septembre dernier dans le hall de son école, à l'âge de 58 ans, épuisée qu'elle était de devoir ramer sans cesse au quotidien pour pouvoir exercer son métier tel qu'elle lui donnait du sens.
Allez, tiens, même si c'est pas grand chose, je lui dédie cette critique.