Jimmy Sangster au scénario, Terence Fisher à la réalisation, Peter Cushing et Christopher Lee en vedette, voilà la grande formule gagnante de la maison Hammer. Avec ce Cauchemar de Dracula qui fait suite aux deux premiers Frankenstein, on tient là une des œuvres maîtresses de la firme. Tout y est : des décors gothiques, des couleurs flamboyantes, une intrigue resserrée et parfaitement menée jusqu’à un dénouement formidablement bien imaginé au niveau des trucages. Voilà ce que la Hammer était capable de faire avec un petit budget de 120 000 euros, jouant sur les suggestions et se contentant de montrer deux ou trois images susceptibles de provoquer l’effroi chez le spectateur avec une bonne dose de sang bien rouge.
La grande réussite du film est de s’être éloigné intelligemment du matériau original. Contraint de rechercher une nouvelle femme-vampire après la destruction de celle qui vivait à ses côtés dans les Carpates, Dracula va se rapprocher malgré lui du docteur Van Helsing qui a étudié le vampirisme. Ce duel à distance entre le Bien et le Mal, la science et la légende, va s’amplifier jusqu’à un bref mais saisissant corps à corps. Dans leur rôle respectif, Peter Cushing et Christopher Lee sont fabuleux, le premier en médecin méthodique, le second en comte, tout en sobriété, s’appuyant sur son allure imposante pour asseoir un personnage qui est davantage une ombre passante et inquiétante qu'une figure envahissante.
Avec ce film, la Hammer confirmait en deux années à peine sa capacité à faire d’un genre mineur à petit budget, un film de genre plus profond, marqué par une esthétique remarquable et un lien renouvelé entre Éros et Thanatos. Cape noire contre petites nuisettes aux couleurs chatoyantes se croisent la nuit sous la lune tandis que l’homme de science court les cimetières brumeux avec son marteau et son pieu. Un classique prenant, soutenu par son excellente musique, qui posa les bases d’un genre qui fit le bonheur des amateurs de frissons pendant dix ans. Brillant.