C'est peut-être le film le plus connu de la Hammer, et sa réputation est amplement méritée. On trouve là toutes les qualités des meilleures productions de la firme anglaise: photo, costumes et décors soignés, atmosphère victorienne feutrée (même si le film est situé en Europe de l'Est), mais pas pour longtemps, personnages pour certains incrédules et qui vont être confrontés à des horreurs diverses: angoisse, innocence dévoyée, violence, deuil, etc. Habilement, le film, qui pioche plus dans l’œuvre de Stoker qu'il ne l'adapte, nous déroute en éliminant en cours de chemin un personnage qu'on avait pris pour le héros.
Et n'oublions pas cet autre atout: des actrices et des acteurs convaincants. Habitué, de par son physique, aux personnages assez secs, Peter Cushing incarne ici un Van Helsing profondément humain (il est bouleversé quand il découvre le sort funeste de son ami), compatissant, ferme quand il le faut, courageux toujours. "Le Cauchemar de Dracula" doit aussi évidemment beaucoup à l'interprétation de Christopher Lee, qui parvint, après Bela Lugosi, à incarner un nouveau Dracula emblématique: ce rôle quasi-muet rend le vampire encore plus mystérieux et inquiétant, Lee joue parfaitement sur sa dualité, tantôt aristocrate racé, tantôt bête sanguinaire impitoyable. Sa présence à l'écran a beau être finalement assez réduite, Dracula vampirise (ha ! Ha !) tout le film: on sent continuellement sa présence menaçante. Il fallut attendre huit ans et "Dracula, prince des ténèbres" pour que Christopher Lee accepte de rendosser la cape du comte maléfique: il craignait de se faire enfermer dans le rôle. Il était lucide...