Le film pourrait être présenté comme un anti Yojimbo ou un inconnu débarque dans une bourgade isolée pour y restructurer son corps social alors en plein pourrissement (une querelle oppose les éleveurs de bétail et agriculteurs autour de la délimitation du territoire).
L'antagoniste, un administré tenancier de l'unique saloon du village, tient le rôle d'un juge exerçant une forme bien à lui de procès publics qui s'apparentent plus à de la justice sauvage.
Ces enjeux posés dès l'ouverture laissant supposer un traitement classique sur l'opposition entre éthique et justice sont très vite balayés par le mouvement de communion initié par le personnage de Gary Cooper.
Et c'est dans cette énième relecture de la conquête de l'ouest que le film prend un virage propagandiste (pléonasme quand on se penche 5 secondes sur ce genre filmique mais même pour un puriste chevronné là il faut avouer que ça ne prend pas de pincettes) assez outrancier.
Ici pas d'élément dissonant comme 10 ans plus tôt dans la période du pré-code, nous sommes en 1940, l'atmosphère politique américaine s'est rigidifiée autour de l'exacerbation de valeurs morales.
Le personnage d'antagoniste ne sera jamais réellement puni pour ses actes (c'est un américain qui aime sa terre avant tout) et tous les moments de tensions qui quelques années plus tôt se seraient résolus à coups de carabines sont désamorcés par le beau Gary et son éloquence souveraine. L'heure n'est pas à la discorde, il faut rassembler, montrer un peuple capable de dépasser avec diplomatie ses divergences.
La technique se met au cordeau de cette intrigue sans réels accrocs. Toute la machinerie y est parfaitement bien huilée (on pourrait reprocher l'enchaînement très "artificiel" des situations de conflits et leurs résolutions). Du cinéma classique à la maîtrise formelle bien tenue d'un William Wyler rentrant dans son âge d'or.