Au jour dit, inéluctablement, ils seront réunis dans le cercle rouge

"Le cercle rouge" comme la plupart des films de Melville tend à l'épure, à la recherche de ce qui est fondamental, ici, dans un polar.
Les dialogues, minimalistes, sont réduits à l'essentiel, suffisants pour communiquer quand c'est indispensable : les choses se jouent à travers les regards, les gestes. Le rendu des scènes n'en est que plus intense et le spectateur concentre son attention sur les détails de la mise en scène des acteurs : le coup d'œil, le jeu des mains, le regard, …
Dès le carton d'ouverture (à propos du cercle rouge où doivent se retrouver inéluctablement les hommes), le ton est donné : c'est le destin (ou la fatalité) qui va gouverner le film. Personne ne le sait mais le destin est en marche pour chacun des protagonistes.
On ne sait rien du passé de Corey (Delon), Vogel (GM Volonte) ou Jansen (Montand) et on n'en a pas besoin. Ils sont coupables ! Le spectateur n'a plus qu'à se concentrer sur les personnages, lire en eux leurs états d'âme, leurs peurs, leurs doutes. Et l'action est suffisamment lente pour prendre le temps d'observer et de comprendre. Et de savourer.
La réunion "improbable" de ces trois personnages dont on devine des itinéraires personnels très différents, des personnalités différentes et des motivations différentes, fait la force du film.
Gian Maria Volonte, sombre et farouche. Ah le regard qu'il jette en arrière lors de sa fuite du train. La caméra se fixe sur l'œil en gros plan et on voit la peur, la rage dans ce regard. Il n'est pas un professionnel, dit-il et pourtant il en possède tous les codes.
Delon en service maîtrisé (par Melville), sombre. Il ne se risquera un léger sourire que pour la vendeuse de cigarettes dans la boite qui lui offre une rose.
Montand, c'est autre chose. Lui aussi est complètement maîtrisé par Melville. Là, point de cabotinage, de grands airs (à la Montand, justement) : sa motivation, c'est de prendre une revanche sur les habitants du placard. Mais aussi quelle revanche !
Bourvil en commissaire de police dont on sait le calvaire qu'il a vécu pendant le tournage. Paradoxalement, c'est lui qui apportera sa touche d'humanité au film. Quand il rentre chez lui et qu'il s'occupe de ses chats, brusquement la tension retombe. La scène est répétée quasiment à l'identique deux fois : on est là dans la normalité, dans le monde ordinaire qui est parallèle à celui des truands. Monde ordinaire que les truands ne connaissent pas (ou ne peuvent pas connaître).
D'ailleurs, si on considère que Delon, Volonte et Montand vont être réunis dans un cercle à la fin, on peut raisonner de la même façon avec les policiers : Marchand (le patron de l'IGS), Montand et Bourvil vont aussi se retrouver car ils se connaissent tous de longue date.
"Le cercle rouge" est un film passionnant, fascinant qu'on peut voir et revoir et toujours découvrir quelque chose. Il en est de même des autres films de Melville comme "l'armée des ombres", "le samouraï", "le doulos", etc… dont on ne sort pas indemne et dont les images hantent le spectateur longtemps après avoir vu le film.

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le 22 nov. 2020

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