Avec "Le Ciel rouge", Grand Prix du jury à Berlin 2023, le réalisateur livre un conte rohmérien à l’heure de tous les dérèglements, avec un quatuor d’acteurs qui déconstruit le récit avec une fluidité stupéfiante.
Christian Petzold inscrit son récit dans le romantisme allemand avec une maison sertie dans une clairière, d’où l’on peut s’échapper comme par magie pour rejoindre la forêt, la mer…
Tout serait léger si Leon n’était pas prostré dans son mal-être et sa suffisance : son roman le hante, il est écrivain , et personne ne peut le comprendre, pense-t-il, ni le sauveteur en mer ni Nadia.
Le désir affleure sans faire l’objet de discussions, contrairement à l’œuvre rohmérienne, et l’amour se fait hors champ. Comme si Christian Petzold voulait faire autrement, en commençant par ausculter son personnage le plus frustré.
C'est à travers le dérèglement introduit par "Leon", son mépris de classe, sa propension à tout gâcher, que les autres personnages réactivent la place de chacun, lors d’échanges affûtés, drôles, d’où surgit l’inattendu. La légèreté circule à nouveau, rien n’est vraiment grave, si ce n’est que l’air commence à se charger de la fumée de la forêt...
Dans Le Ciel rouge, les protagonistes semblent être à la fois hors de la réalité et protégés d’elle par le « conte », tout en étant au plus près du danger – la maison est dans les bois.
En travaillant sur cette tension, et en puisant dans l’histoire, le cinéaste propose une bouleversante réflexion sur l'instant amoureux.