Le cinéaste allemand signe un superbe et émouvant conte d’été, dans lequel on retrouve tout ce que l’on aime à savoir les vacances, le soleil, l’amitié, les amours et les emmerdes. Somptueusement photographié et remarquablement interprété, ‘Le ciel rouge’ est l’un des très beaux films que l’on peut voir en ce moment au cinéma.
Une petite maison de vacances au bord de la mer Baltique. Les journées sont chaudes et il n'a pas plu depuis des semaines. Quatre jeunes gens se réunissent, des amis anciens et nouveaux. Les forêts desséchées qui les entourent commencent à s'enflammer, tout comme leurs émotions.
Le film est très bien construit. La caméra et l’histoire suivent d’abord un duo d’amis, avant d’y greffer une fille puis son mec. Petzold filme les échanges de regards, les conversations mais semble progressivement se concentrer sur le personnage de Léon, puis du duo qu’il forme avec Nadja. Tout en existant, les deux autres personnages Felix et David restent au second plan.
Le quatuor vit un bel été, avec repas arrosés, fous rires et détente à la plage. La très belle idée est d’y faire poindre (en tout cas au début) un soupçon d’inquiétude. Les forêts brulent à quelques kilomètres. Petzold intègre progressivement ces incendies à son histoire. Une menace pointe à l’horizon. Il y a robe très rouge de Nadja dans une nature très verdoyante, un message des pompiers que l’on écoute à peine, un ciel rouge. Mais nos protagonistes n’en font d’abord aucun cas. Avant que la réalité ne vienne percuter leur semaine ensoleillée.
La grande réussite du film est d’alterner le film de vacances, d’été avec ce qui va avec (les baignades à la mer, les intrigues sentimentales, les clashs) avec un film catastrophe, à l’ambiance de fin du monde. Il y a cette forêt, ces animaux en feux. L’ambiance a parfois des airs d’apocalypse. Face à cette alternance, le spectateur est à la fois confortable dans le film d’été et subjugué par la beauté des plans du film catastrophe.
Le sujet du film est la cécité avec son personnage d’écrivain aveugle (pas littéralement, mais au moins d’un point de vue émotionnel). Il ne voit pas les sentiments de Nadja à son égard, il ne voit pas l’idylle naissante entre son ami et le mec de Nadja, il ne voit pas la maladie qui ronge son éditeur. Non, il est bien trop obsédé par son second roman qu’il vient d’écrire et qu’il doit relire avec son éditeur. Face à lui, il y a Nadja. Celle qui voit, celle qui ressent. Elle passe son temps à tenter de percevoir les émotions de Léon.
Car le film raconte parfaitement la complexité des sentiments. Je ne voudrais citer qu’une scène au milieu du film. Nadja a des sentiments pour Léon qui accepte de lui faire lire son manuscrit. Il faut voir cette scène magnifique où elle lui annonce qu’elle a détesté son roman. A la question « As-tu aimé ? » que lui pose Léon, elle répond par un simple non qui dit toute sa déception.
Il faut dire que les interprètes sont remarquables. Paula Beer a une présence et une palette de jeu exceptionnelle. Quant à Thomas Schubert, il est parfait dans sa fermeté, dans sa dureté avec son physique assez massif.
Le cinéaste allemand signe sans aucun doute l’un des très beaux films que l’on peut voir sur les écrans. Beau visuellement et émotionnellement mais surtout bouleversant.