Yves Angelo bénéficie d'atouts solides pour sa première réalisation, de quoi mettre l'ancien chef opérateur sur de bons rails. Le soutien à l'écriture du vétéran Jean Cosmos, un budget plus que confortable, une distribution prestigieuse (Depardieu, Ardant, Luchini, Rich...). Plus encore il bénéficie d'une formidable histoire : dans son court roman, Balzac utilisait la période de la Restauration pour raconter l'histoire de la déchéance d'un homme qui est monté très haut pour finir très bas, tout en dressant le portrait d'une aristocratie, pétrifiée par son intérêt pour l'argent, sa soif de renommée, la peur d'être déshonoré : Le colonel Chabert est un concentré de misanthropie qui peut donner envie de fuir le monde et, comme le Colonel Chabert de se réfugier dans un hospice pour n'en plus sortir.
Avec toute cette bonne base, Yves Angelo fait du bel ouvrage, un film de bon élève qui utilise son budget pour évoquer l'horreur de la bataille d'Eylau (le traumatisme qui plane sur le film) ou plus simplement, par le décor, les costumes pour bien illustrer l'époque. Mais son film se révèle sans doute trop sage, trop évident par rapport à ce que l'on peut attendre de ce genre d'adaptation grand train - même le choix de Depardieu est finalement sans surprise (qui pour succéder au monstre Raimu dans l'adaptation de 1943 ?). Plus encore que lui ou que Fanny Ardant (totalement à sa place), ce sont certains seconds rôles qui tirent leur épingle du jeu : Daniel Prévost dans le rôle d'Amédée Boucard et surtout Fabrice Luchini dans celui de l'avoué Derville, un comédien sur le voie de la sobriété. Le colonel Chabert d'Yves Angelo se regarde donc avec un certain plaisir mais sans passion.