La trame historique est interessante : pendant la guerre de sécession, il fallait établir un courrier de l’or, fréquent, transportant de la richesse de la Californie vers l’Est, au profit de l’Union (le Nord) .
L’histoire se focalise sur les obstacles accumulés devant le responsable du transport, joué par Randolph Scott, par des partisans du Sud dont un de ses anciens collègues d'avant-guerre devenu riche, joué par Andrew Duggan. Celui-ci est de plus marié avec l'ancienne dulcinée de l’autre, jouée par Virginia Mayo, et il utilise maintenant des hommes de main dont un tueur redoutable, joué par Michael Pate.
On apprécie Randolph Scott, son personnage élégant, peu loquace et parfois profond, notamment pour un superbe dialogue avec le soldat infirme, joué par Michael Dante, sur les différences entre les civils et les soldats quant à la haine qu’ils expriment envers les adversaires.
Pour les soldats, confrontés aux blessures et à la mort, des leurs comme à celles des ennemis, la douleur amène compassion et estime voire solidarité y compris donc avec ceux d’en face, tandis que chez les civils il y a plus de rancune, car la perte d’un proche avive le sentiment que « c’est la faute des autres ».
Il y a plusieurs moments de vraie tragédie (la mort progressive du manchot, la chute d’une diligence dans le ravin) qui captivent notre attention - alors que dans les westerns la mort d‘un personnage secondaire n'est souvent qu'un rebondissement banalisé parmi les autres.
On s’attend à ce que l'adversaire de Scott soit un « bad guy » mémorable, après ceux qui furent portraitisés dans les quatre chefs d’oeuvre de Boetticher tournés avant ce film-ci.
En fait, l'originalité est que le méchant est réparti dans trois personnages : Putnam (Andrew Duggan) est un partisan sudiste contradictoire qui ne voudrait pas que le sang coule mais qui est secondé par un tueur ; le tueur lui-même, Mace, joué donc par Michael Pate (un habitué des rôles de chef indien) est trop caricatural, physiquement et moralement (sauf dans une tres bonne scene de gunfight au début, où il fait tomber par un tir précis la ceinture de Scott, le ridiculisant devant la foule) ; et la belle Virginia Mayo, l’ex-fiancée, pro sudiste amère et aimant peut-être les deux rivaux, est peu convaincante dans ce rôle composite, elle qui est pourtant une égérie de nos westerns de série B.
Enfin, le gunfight final dans la ville commence comme ceux qu’un autre réalisateur, Andre de Toth, sait tres bien faire : un cache-cache dans les rues, les galeries en bois et les maisons. Mais ici notre Budd ne tient pas la distance.
Puis la foule, qui s'est montrée bien pro sudiste mais qui veut se racheter, sauve le héros yankee... Puis Scott abat le tueur pendant qu'il tente de fuir à cheval.
Si la scène finale est décevante, il y a quand même la touche narrative du Boetticher qu'on aime pendant la minute qui suit la chute du tueur.
Un gros plan sur l'homme abattu dans la poussière, camera à ras de terre, nous dit : est-il vraiment mort, va-t-il se relever ? Un quidam passe près de lui et shoote dans le revolver près de sa main, ce qui nous donne la réponse : il n’y aura pas de rebondissement, c’est fini !
Definitely very good...
(Notule de 2019 publiée en janvier 2025)