La semaine dernière, j'ai revu Le dictateur de Charlie Chaplin sorti en 1940.
Bon, je vous fais pas le résumé, vous connaissez déjà tous, non ? Dans le doute, je la fais courte : un barbier juif retourne après la guerre dans son petit quartier de Tomainie, pays dirigé par le dicateur Adenoid Hynkel qui aime à persécuter le peuple juif et qui est affublé de la même petite moustache que notre barbier. Evidemment toute ressemblance avec une situation géopolitique contemporaine au film serait purement fortuite.
A mon très humble avis le meilleur film de Chaplin (bien que je ne les aie pas tous vus), qui le hisse au sommet de son art. Chaplin est probablement l'un des plus grands génies comiques de l'histoire du cinéma car il est capable de faire rire aux éclats et de donner envie de chialer dans le même film. Ca se voyait déjà avec The Kid, son premier long-métrage ; ça se confirme avec le dictateur. Voir un SS et un juif se courir après en enchaînant les pirouettes, c'est aussi amusant que glaçant. Voir un dictateur jouer avec un globe gonflable, c'est aussi poétique que terrifiant.
A l'époque, le monde ignorait encore complètement à quel point Chaplin avait raison sur l'ampleur que la persécution des juifs atteindrait, et lui-même affirma avec horreur quelques années plus tard qu'il n'aurait jamais pu tourner ce film s'il avait pu croire que ça se passait réellement. A l'époque porté par de l'exagération et de la caricature du régime national-socialiste, le recul porté sur le film des années plus tard lui donnera un certain réalisme beaucoup plus glaçant.
On ne présente pas non plus évidemment le monologue de fin du barbier, qui remplace le dictateur suite à un quiproquo (oui désolé c'est un spoil mais c'est une des scènes les plus belles de l'histoire du cinéma). Des mots forts qui feraient pâlir tous les adolescents qui cherchent une citation pour leur photo de couverture, une ambiance musicale subtile qui accompagne la musique du discours, un plan fixe sur le visage de Chaplin entrecoupé seulement d'un plan sur son amante désespérée des kilomètres plus loin ; et surtout Chaplin, Chaplin et sa voix si juste, ses yeux exhorbités, la fin de son monologue habité par quelque chose de plus grand, transpirant, transcendé ; Chaplin qui pour ceux qui en douteraient encore à ce moment là incarne toute la force de ses idées en la personne du petit barbier juif.
Bref. Je me pose une question. Si l'on devait choisir lun réalisateur qui serait la plus grande icône du cinéma occidental, sur qui le choix devrait-il se porter ? Hitchcock ? Tarantino ? Leone ? Spielberg ? A mes yeux, ce serait forcément Chaplin. Qui peut se targuer d'avoir un nom et un visage connu plus de cinquante ans après sa mort de quasiment tout le monde ? Qui peut se targuer d'avoir traversé le muet, le parlant et la couleur en marquant les esprits à chaque fois ?