Premier film très ambitieux, notamment sur le plan financier, de la Hammer, Le Fantôme de l’opéra fut un flop à sa sortie qui provoqua la mise à l’amende de son réalisateur Terence Fischer. S’il y a pourtant quelqu’un à ne pas blâmer ici, c’est bien lui. L’ambiance flamboyante du film, les plans audacieux et la fluidité narrative de l’ensemble reposent en grande partie sur ses épaules. Plastiquement, l’ensemble est vraiment d’une grande beauté et, même si on en a l’habitude avec la Hammer, ce point ne peut être passé sous silence.
Si le résultat peut, à première vue, paraître décevant, c’est que les audaces du scénario se retournent contre lui. C’est aussi certainement parce qu’elles sont globalement mal exploitées. Faire du récit original un récit de vengeance est, sur le papier, une facilité qui est, en réalité, une force (Brian de Palma reprendra cette idée du vol de l’œuvre artistique pour s’ouvrir de nouvelles thématiques, et « le monstre » est ainsi, au final, moins monstrueux que les supposées grandes gens). Malheureusement, et c’est la faiblesse principale ici du récit, la vengeance manque de tension en dépit d’un méchant vaniteux qu’on aurait aimé voir être effrayé puis châtié. Ce point-là, pierre angulaire de la réécriture de l’histoire originale, n’étant pas approfondi, le film n’a pas de réel enjeu à traiter. Très vite, tout le monde s’accorde à considérer l’antagoniste comme une enflure et le récit n’est plus alors qu’une petite histoire sans mystère.
Le résultat, s’il est loin d’être désagréable, ne peut donc pas être à la hauteur des attentes. Visuellement, c’est très beau, le potentiel de l’ensemble est réel, on trouve une profondeur qu’il n’y a pas toujours dans les films de la Hammer, mais si l’histoire se suit, c’est sans surprise ni émotion particulière. On regrettera également, alors que les scènes d’opéra prennent une place importante dans le film, que la mise en abyme ne soit pas plus importante avec l’histoire contée. La fin du récit tente bien de faire le grand écart pour réconcilier tous ses thèmes mais c’est un peu faible. Nul doute cependant que la matière de cette version soit à l’origine du chef d’œuvre de de Palma tourné dix ans plus tard.