Remplissage

Quant Jackson a adapté Le Seigneur des Anneaux à l'écran, il a dû opérer de larges coupes dans le texte original, tant le roman était riche et foisonnant. Cette pratique est normale. Mais avec Le Hobbit, il a voulu refaire une espèce de Seigneur des Anneaux II, en plusieurs films avec l'épopée, les grandes batailles, et toute la matière que le roman original de Tolkien ne lui offrait pas. Il lui a donc fallu, au lieu d'élaguer comme dans la première série de films, remplir, étoffer, gonfler l'intrigue d'une série d'histoires et de développements parallèles qu'il a tirés de son propre fonds, pas de Tolkien, ou rarement. C'est là que le bât blesse : ce qu'ajoute Jackson, ce sont des fioritures, des scènes annexes venues de sa culture cinématographique la plus basique. Banalités, clichés, épisodes vides, enjolivures. Un exemple : la scène des trolls, dans le roman, est un passage à la fois amusant et subtil, puisqu'il s'agit de leur faire perdre leur temps jusqu'au lever du soleil qui les change en pierres. A quoi bon, dans le film, ce grand coup d'épée qui laisse passer la lumière du soleil ? Et pourquoi toutes ces péripéties dans ce qui n'est, en fait, qu'un jeu d'intelligence et de ruse ? Enfin, à quoi bon ces explications suivant la scène, comme si le spectateur n'était pas capable de la comprendre lui-même ? Si ce premier film reste supportable, quoique légèrement désolant à cause de tous ses clichés de cinéma, l'ennui gagne aux suivants.