Je ne serai pas original, mais ce remake de "Sleuth" est évidemment très inférieur à son prestigieux prédécesseur.
En 1972, Joseph Mankiewicz réalisait son ultime long-métrage, un huis-clos pervers mettant face à face Sir Lawrence Olivier et un certain Michael Caine, dans le rôle du jeune amant ambitieux.
Cette fois, dans la version de Kenneth Branagh, Caine reprend l'autre rôle principal, celui du vieux mari délaissé par sa femme, qui s'affiche à Londres avec un jeune acteur au chômage, ici interprété par Jude Law.
La première difficulté de ce remake tient aux enjeux du duel, qui sont moins évidents à notre époque, à l'instar du divorce refusé par le mari, qui pouvait faire sens en 1972, beaucoup moins aujourd'hui.
De même la différence de classe sociale entre les deux rivaux, si elle reste pertinente, n'a pas le même impact dans la société contemporaine, il me semble.
Le film de Branagh est également plus bref : si sa version gagne en dynamisme, elle perd en montée de tension, tant "Le limier" de Mankiewicz était un modèle du genre. Ici, les évènement s'enchaînent un peu rapidement ; ainsi, Tindle est bien (trop) vite convaincu par la proposition de Dyke.
Enfin, le sous-texte homosexuel, s'il était présent en 1972, restait sous-jacent, contrairement à la lecture ouvertement gay de Branagh, qui vient ruiner quelque peu le troisième acte, qui part dans tous les sens et s'apparente à une grande bouffonnerie.
Toutefois tout n'est pas à jeter dans ce remake, qui permettra à une nouvelle génération de s'intéresser à la pièce originale d'Harold Pinter.
L'idée est ainsi pertinente de substituer les jouets mécaniques d'Olivier par les joujous électroniques de Caine, dont le bâtiment ultra-moderne dédié à la domotique vient remplacer le manoir cosy de la version précédente.
La mise en scène est élégante, et les comédiens ne déméritent pas, dans le registre de l'outrance qui leur est réclamé, notamment à Jude Law.
Dans l'ensemble, je reste quand même assez déçu : si j'ai eu un certain plaisir à me plonger dans une relecture de ce duel infernal, ne serait-ce que pour voir comment Branagh gérait le fameux twist central, le visionnage de ce nouveau "Sleuth" m'aura surtout donné envie de revoir l'original.