Le commissaire Jordan,policier aux méthodes brutales et expéditives outrepassant allègrement les limites de la Loi,est obsédé par l'envie de faire tomber le sinistre Mecacci,parrain du trafic de drogue qui lui a toujours échappé.On peut considérer que ce film sonne le glas du star-system Belmondo,dont la dernière bonne production est "Le professionnel",sorti en 81.Déjà,en 82,"L'as des as" amorçait la descente en dépit d'un triomphe au box-office.Là,ça se confirme car "Le marginal",gros succès également,est très insatisfaisant d'un point de vue qualitatif.La dégringolade se poursuivra de plus belle l'année suivante avec "Les morfalous",et ça ne fera qu'empirer ensuite.Pourtant,tous les ingrédients de départ habituels sont bien présents:un flic violent,obstiné,gouailleur,dragueur,au look décontracté jeans et blousons de cuir,qui poursuit inlassablement un criminel notoire malgré l'opposition de sa hiérarchie elle-même conditionnée par les décisions d'un pouvoir politique corrompu.Bébel s'est comme de coutume entouré de ses complices habituels.Sa société Cerito Films produit,Jacques Deray,pour qui il avait tourné "Borsalino",réalise,Michel Audiard a écrit les dialogues,son frère Alain Belmondo est directeur de prod,Ennio Morricone signe la musique,Rémy Julienne et Claude Carliez règlent les cascades,René Chateau,son associé chez Cerito,est attaché de presse,et son coiffeur Charly Koubesserian est aussi de la partie,alors que la plupart des comédiens sont des partenaires attitrés de la star.Mais réunir tout ce beau monde n'a pas suffi,et l'entreprise sent la fatigue et la fin de règne.Si la partition de Morricone et les cascades automobiles de Julienne sont au niveau,on ne peut en dire autant des dialogues très fatigués d'un Audiard en petite forme ou des cascades "humaines" d'un Carliez qu'on a connu plus spectaculaire.Mais le gros problème vient surtout du scénario coécrit par Deray et Jean Herman.Ce dernier a pourtant des références car on lui doit quelques films honorables en tant que réalisateur,principalement "Adieu l'ami" avec Bronson et Delon,ainsi que des romans ,publiés sous le nom de Jean Vautrin,qui firent leur effet à l'instar de "La vie Ripolin" ou "Un grand pas vers le Bon Dieu",prix Goncourt 89.Mais ici les auteurs ont manqué d'enthousiasme et d'inspiration et se sont contentés de tout miser sur le numéro de frime de leur vedette,ce qui est un peu court.D'où un enchaînement assez mou de scènes décousues exploitant le potentiel physique et le capital sympathie de l'acteur au fil d'actions souvent vues dans ses films.C'est donc un Bébel un peu usé et vieillissant qui effectue encore lui-même ses cascades,mais avec moins d'énergie qu'autrefois,ce qui en limite la portée spectaculaire.Bébel saute d'un hélico sur un bateau,Bébel cavale après les affreux dans les rues,dans les escaliers,sur les toits,Bébel balance des bourre-pifs dévastateurs,Bébel sort son flingue et tire avant de causer,tout ceci tournant plutôt au ralenti.La trame scénaristique est des plus simplettes:Jordan va se faire Mecacci.Mais évidemment,il faut attendre la fin pour voir ça,et ça arrivera lors d'une scène mal foutue et vite expédiée.Pour meubler entre-temps,outre la débauche de violence dispensée par le héros,les auteurs ont eu l'idée de jouer la carte du glauque,genre ambiance eighties délétère,peut-être pour choquer le bourgeois et donner du relief à leur intrigue en carafe,mais cet underground en carton-pâte prête plus à sourire qu'il n'effraie.Du coup,on déplace l'enquête du flic à travers toutes sortes de lieux de débauche et de perdition où rôdent le vice et le danger.Ce qui donne Bébel au bistrot arabe,Bébel dans des salles de jeux enfumées,Bébel au squatt coupe-gorge,Bébel dans les rues chaudes,Bébel au resto mal famé,Bébel au tripot clandestin et ainsi de suite.Ce catalogue d'endroits pourris où la star se livre à diverses violences sert de colonne vertébrale à une histoire manquant singulièrement de densité et de cohérence.Le héros n'est finalement pas très sympathique et son recours systématique à la force lui octroie l'allure d'un boeuf,ce que le scénario tente de corriger en soulignant à l'occasion ses bons côtés,car le gars sait être gentil avec les enfants ou défendre les putes,et son comportement est justifié par sa révolte devant les ravages de la drogue sur la jeunesse et l'impunité dont bénéficient les trafiquants.Ce qui soulève un point parfois évoqué durant le film,la complicité du monde politique et sa proximité avec la pègre.Hélas,ce n'est jamais creusé,juste évoqué au détour de quelques phrases,et on en reste à une dénonciation imprécise et superficielle.La distribution est un régal,dommage que les comédiens soient réduits à la portion congrue afin de laisser place à la star.Le méchant de service est l'américain Henry Silva,très crédible avec sa sale gueule de gangster vicelard,et on voit passer des seconds couteaux figurant parmi l'élite de l'époque tels Pierre Vernier,Roger Dumas,Claude Brosset,Maurice Barrier,Didier Sauvegrain,Jean-Louis Richard,Michel Robin,Gabriel Cattand ou Jean-Roger Milo.Plus quelques curiosités:un Tcheky Karyo tout jeunot et pas encore connu,Jean-Claude Dreyfus en travelo,un emploi qu'il a beaucoup tenu sur scène,la belle eurasienne Ysabelle Lacamp qui connaîtra plus tard un certain succès en tant qu'écrivain et le géant Jean-Hugues Lime,qui eut une brève carrière d'humoriste.Notons aussi la présence du champion de boxe Stéphane Ferrara qui,lors d'une séquence surréaliste,se fait dérouiller par un Belmondo qu'il aurait sans problème envoyé au tapis dans la réalité.Sans oublier la brésilienne Carlos Sotto Mayor,très jolie mais piètre comédienne,dont on se demande ce qu'elle fout là.En fait,non,on ne se le demande pas car elle était à l'époque la compagne de Bébel,ce qui lui vaudra de jouer encore au côté de Jean-Paul quatre ans plus tard dans "Le solitaire",qui sera le dernier Belmondo-Deray.Bon,une carioca prénommée Carlos,ça interpelle,mais aux dernières nouvelles il s'agissait bien d'une fille.Pour finir,signalons qu'il y a deux futurs cinéastes au générique,l'assistant-réalisateur Frédéric Blum et le directeur photo autrichien Xaver Schwarzenberger.

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le 1 nov. 2019

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