Toujours le grisbi, mais jamais le talent de Becker

Avec un casting 4 étoiles, Audiard aux scripts et le sympathique faiseur Gilles Grangier aux manettes, cette adaptation d’un livre d’Auguste Le Breton, dialoguiste sur ce film, avait tout pour élever le genre polar dans des sphères bien plus élevées que ce spectacle quelconque auquel nous assistons au final.


Faute à une mise en scène paresseuse de Grangier, qui même s’il n’a jamais atteint le niveau de perfectionnisme d’un Jacques Becker ou d’un Henri Georges-Clouzot, voir l’amour du travail bien fait d’un Henri Verneuil ou d’un Henri Decoin au meilleur de leur forme, avait réussi avec des films comme Gas-Oil ou Le Sang à la tête des incursions d’excellentes factures dans l’univers du prolétariat. Le petit peuple qu’il savait filmer fort justement.


Avec Le Rouge est mis, il use avec insistance des défauts inhérents à l’ensemble de son œuvre. Une patte lourde, un style qui tente d’imiter le cinéma de Jacques Becker, on sent l’obsession Touchez Pas Au Grisbi, sans jamais parvenir à s’éloigner d’un script trop directif.


L’un des intérêts de ce petit film réside dans son casting. Alors il y a Jean Gabin. Gabin quoi. On y voit un Lino Ventura qui talonne déjà le maître de par sa présence. Une toute jeune Annie Girardot, qui vient jouer la femme-fatale, apparaissant dans un plan de jambes, directement inspiré par L’Assurance sur la mort de Wilder, les grands cinéastes américain ayant fortement inspirés les artisans du polar à la française, qui eux-mêmes usèrent de la structure visuelles du réalisme poétique cher à des cinéastes comme Carné ou Duvivier. Apparaissent également des tronches incontournables du genre hexagonal comme Paul Frankeur, Albert Dinan ou Marcel Bozzuffi, ainsi qu’une petite participation de Jean-Pierre Mocky.


Le manque de style et certaines idées d’un script trop didactique, Gabin se faisant gifler par sa maman… - mouais - de longues séquences d’exposition sans intérêt, une course poursuite filmée mollement qui tente de singer Le Grisbi, sauf qu’il n’y a aucune idée de mise en scène, autant de défauts qui viennent gâcher la sincérité pourtant évidente d’un Grangier dont la réalisation manque de consistance. Tout ça donne un honnête petit film sans saveur, dont les uniques qualités résident dans le jeu des protagonistes, et une incursion plutôt convaincante dans la France prolétarienne de l’époque.

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le 14 avr. 2020

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