Le Sacrifice par Nicolas Montagne
Film testament d'Andrei Tarkovski, Offret est un immense et improbable condensé de l'oeuvre et de la pensée du russe expatrié. On y retrouve toute la problématique du temps scellé, la nature omniprésente qui agit directement sur l'état des personnages, l'idéal du sacrifice pur et innocent. Point de sensationnalisme, l'annonce télévisée de ce qui va bouleverser la vie des personnages (surtout celle d'Alex) n'est jamais montrée, on se concentre sur la réaction des personnages, emphatique chez certains, discrète pour d'autres, mais en tout cas toujours consciente du futur incertain, voire apocalyptique.
Après nous avoir montré les personnages complétement désoeuvrés,emplis d'asseptisme et de superficialité, Tarkovski nous montre une autre facette, directement reliée à Petit Garçon, muet pour le geste, et qui résume parfaitement le film à sa toute fin: "Au commencement était le verbe...mais pourquoi papa?", ou comment un petit garçon peut comprendre la soudaine illumination folle d'un père jusque là totalement absent et égoïste, enfermé dans un monde d'icônes stériles n'ayant pu l'aider, contrairement au mythe antagoniste de la sorcière, Maria.
Un film somme, encore plus frappant que Solaris, démontrant dans sa toute fin l'excellence de la mise en scène de son auteur, lors d'un très long plan-séquence incroyablement risqué mais mené à son terme finalement. Difficile d'en dire plus, le film se vit plus qu'il ne se commente, comme souvent chez Tarkovski...