Peu de films sur le Moyen-Âge parviennent à retranscrire avec autant de justesse cette époque, et surtout, peu de films (ou d’œuvres de fiction, en général) sont consciente que cette longue période de 1000 ans ne s'est pas résumé à d'immense châteaux et à des armures lourdes des XIII, XIV, voire XVème siècles!
Non, à cette époque, les chevalier portent de la maille, des armures cloutées en cuir, des casques et des boucliers normands, les "châteaux" se résument souvent à des mottes de terre surmontées de palissades et de cabanes ou à une tour entourée de douves ou d'un muret (et encore la pierre est-elle le signe d'un certain luxe!). De ce point de vue, le film gagne donc mon respect : pas de décors grandiloquents, pas de costumes d'un luxe extravagant, pas de ville (juste quelques maisons autour de la demeure du seigneur et quelques gros corps de ferme qui font office de centre d'échange et de proto-villages). En revanche, on pourra reprocher toute l'intrigue autour du paganisme supposé de la population. L'ancienne Gaule a en effet été christianisée depuis bien longtemps, et les rares païens qui s'y trouvent encore sont persécutés par les seigneurs locaux, sinon par l'Église qui se substitue volontiers à ces derniers s'ils font défaut (sur ce point, les personnages semblent peu affectés par la présence de cultes païens, une tolérance presque inconcevable à cette époque). Le scénario n'aurait pas nécessité trop d’accommodations si la population avait simplement été hérétique. Enfin, le "droit de cuissage" qui est à l'origine de l'intrigue, n'a jamais existé. Il faut néanmoins préciser que ledit droit est présenté dans le film comme problématique : il s'agirait d'un droit issu des lois païennes ne s'appliquant pas dans la culture dont est issu le seigneur (et donc contraires aux lois de Royaume et de l’Église). Le droit de cuissage n'est donc justement pas présenté comme un "droit", mais bien comme un abus de pouvoir du seigneur qui n'est accepté par la population que dans la mesure où il est compatible avec leur culture.
Bien qu'on ne s'attarde pas longuement à la construction des personnages, ceux-ci sont si bien écrits que leur psychologie se devine assez rapidement, si bien que leurs interactions sont fluides et limpides. Comme quoi, il n'est pas toujours nécessaire d'avoir une demi heure de background pour avoir de bons personnages. L'histoire en elle-même n'est pas d'une originalité sans borne (amour contraint par les réalités socio-culturelles de l'époque dont l'issue ne peut être que la fuite ou la mort), mais est si bien scénarisée qu'elle ne laisse pas une impression de déjà vu. Certaines scènes sont même magnifiquement tournées : la première fois que Bronwyn monte en haut de la tour et s'attend à être violée par Chrysagon, la musique oppressante, la caméra suivant la montée des escaliers en colimaçon, le visage effrayé de Bronwyn, les airs menaçant de Draco... il est rare qu'un film parviennent à créer une telle tension. Les scènes d'actions sont également très bien tournées et réalistes (si l'on omet la rapidité avec laquelle les Frisons construisent leurs armes de sièges, dont on imagine difficilement qu'ils aient pu les embarquer sur leurs modestes esquifs).
En bref, une excellente surprise pêchée dans un top du site, et la confirmation de mon faible pour les vieux films d'action ou d'histoire.