"Le Septième Sceau" s'ouvre sur une plage déserte et silencieuse : "Et lorsque l'Agneau ouvrit le septième seau, il se fit un silence dans le ciel". A l'aube sur la plage un homme contemple son échiquier et son serviteur baigne leurs chevaux. Parti en croisade depuis dix ans, le chevalier Antonius Block (Max von Sydow) connaît la mort intimement et quand elle l'aborde ("Il est l'heure, je viens te chercher"), Block décide de berner la Mort. Imbu de ses connaissances aux échecs, il lui propose une partie, espérant ainsi sauver sa vie. La Mort (Bengt Ekerot) aime jouer, se pique au jeu, relève le défi car elle se croit imbattable et veut punir l'orgueilleux. La partie d'échecs dure ainsi plusieurs jours...
Le chevalier et son écuyer se sont Croisés sous l'influence du clerc Raval pour donner un sens à leur jeunesse, aller en Terre Sainte sur les traces du Christ. Pour Antonius le goût de l'aventure pimente la quête religieuse et spirituelle et il s'interroge : Dieu existe-t-il ? La vie a-t-elle un sens ? Le monde n'est-il pas gouverné par le Diable et son exécuteur des hautes oeuvres : la Mort ? Aigri par sa quête métaphysique infructueuse, il interroge la Mort qui n'a aucune réponse, ne croit rien et ne sait rien. Chemin faisant, son écuyer Jöns (Gunnar Björnstrand) se révèle athée, adepte du Néant, mais respecte le code d'honneur de la chevalerie.
Block découvre son pays ravagé par la Peste Noire : Les sept anges soufflent tour à tour dans leur trompette, et à chaque sonnerie un fléau s'abat sur le monde. La Faucheuse emporte un homme sur trois, tous interprètent le Fléau comme un châtiment divin pour que la surabondance de leurs péchés. Dans un village un moine s'enflamme : "La fin des Temps arrive ! Repentez-vous ! nous allons tous mourir ! Le Jugement de Dieu est imminent ! Soyez prêts et priez !" Des processions de flagellants se fouettent parmi les cris d'angoisse et de souffrance...
Le chevalier n'est pas surpris : "Croire fait souffrir. C'est comme un amour dans les ténèbres qui ne répond jamais". Ce Croisé - soldat de la Foi - refuse la foi, provoque la Mort en duel aux échecs dans un esprit de Démesure (l'hybris des Grecs). Une soif de Connaissance insatiable le dévore, son esprit avide d'Absolu l'empêche de comprendre qu'à ses questions métaphysiques, il n'aura jamais de certitudes. Illusion romantique ! Block s'imagine que la Connaissance lui apportera le Salut.
L'orgueil nobiliaire et faustien du Chevalier en fait une marionnette que le Diable manipule à sa guise : "Trompe la Mort" ne peut échapper au Trompeur... Dans une église, Block interroge Albertus Pictor qui brosse des fresques morbides et eschatologiques : danses macabres, le Diable et la Mort, le Jugement dernier, les damnés aux Enfers... Albertus applique l'idéologie de ses commanditaires (prêtres ou moines), une vision d'Apocalypse de la fin des Temps. On dresse des bûchers aux sorcières, Block questionne une jeune femme terrorisée juste avant son exécution pour sorcellerie : "Que sais-tu du Diable ?", mais la pauvresse ne sait que lui répondre...
Bergman a l'idée géniale d'inventer un Double spirituel au Chevalier, le comédien et acrobate Jof (Nils Poppe). Le Chevalier représente la Force au service de la Connaissance, protège une troupe de baladins, une jeune fille muette sans défense recueillie par son écuyer, un forgeron cocu et son épouse infidèle. Le pèlerin soldat, noble de surcroît, est respecté socialement.
Jof est son Double complémentaire : il voyage en famille dans une carriole misérable, leur troupe se donne en spectacles pour quelques sous. Tous méprisent ce jongleur car les divertissements qu'il propose (farces, cabrioles) détournent de la Foi et de Dieu. A une époque de fléaux meurtriers, ses talents de poète, ses chansons et acrobaties ne comptent guère.
Ainsi le prêtre défroqué Raval persécute Jof dans une taverne, l'oblige à danser sur une table jusqu'à épuisement, mais l'écuyer Jöns lui sauve la vie et la troupe se retrouve sous la protection du chevalier. Le bonheur simple de Jof, de sa femme Mia (Bibi Andersson) et de leur fils touche Antonius qui partage avec eux du lait et des fraises sauvages. Block comprend qu'il est bloqué. Dix années de guerre sainte ont cadenassé son cœur, il a oublié et renié l'Amour (une fiancée délaissée au château). Est-il trop tard ? Dans cette prairie printanière éclaboussée de soleil, l'Espérance libère son cœur, Antonius déclare ce jour mémorable, brûle de retrouver son amour de jeunesse.
Témoin essentiel, Jof préserve surtout une naïveté d'enfant et sa pureté d'esprit lui fait voir l'Invisible. Au moment où le Chevalier entame sa partie d'échecs contre la Mort sur la plage, Jof le Visionnaire voit la Vierge et l'Enfant se promenant dans l'herbe près de leur carriole (sa femme Mia se moque de ses visions). Quand leur famille rejoint le Chevalier, Jof est le seul à voir la Mort jouer aux échecs contre lui. Son instinct de Clairvoyant lui ordonne de fuir les forces du Mal, leur salut est dans la fuite !
Après sa victoire aux échecs la Mort emportera Antonius et ses compagnons... Une angoisse insupportable étreint le Chevalier, il doit sauver Jof sa femme et leur bébé, ces trois innocents ! Déconcentration fatale, dont la Mort profite pour le mettre échec et mat. L'inattention et l'amour ont perdu Antonius, mais Jof et les siens sont déjà loin. La Mort oublie l'insignifiant trio mais poursuit le Chevalier et ses autres compagnons jusqu'au château (Antonius et sa fiancée s'y retrouvent). Quand la Mort frappe à la porte, la jeune fille muette (Gunnel Lindblom) retrouve la Parole : "Tout est consommé !" Hors de danger avec sa famille, Jof le Voyant est le Témoin halluciné de terreur d'une Apocalypse nocturne : la Mort entraîne le Chevalier et ses cinq compagnons dans une farandole macabre se découpant sur une colline au clair de lune.