Les "Toupins", individus hauts en couleurs au sommet de l'échelle sociale, siègent dans un luxueux château au centre du Tableau. Guidée par un gourou, cette communauté n'a plus rien à obtenir du Peintre, attendu comme un Sauveur par les "Pafinis" et les "Reufs" disséminés dans la forêt. Jean-François Laguionie adopte dans ce film d'animation un graphisme plutôt sobre, où la couleur, face aux traits et aux textures, joue un rôle prépondérant dans l'élaboration de l'intrigue. Cette histoire plutôt adressée à un jeune public met donc en scène des personnages à la hiérarchie bien déterminée, et aborde de façon simpliste le thème de la discrimination.
Evoluant dans un monde mi-réel mi-dessiné, quelques uns de ces individus partent à la recherche du mystérieux peintre. Au fil des rencontres et des aventures, ils découvrent un monde dont ils ignoraient l'existence, des personnages des plus bariolés jusqu'à la mort en personne, en passant par une brochette de peintres attendant le coucher du soleil. Si l'idée originelle se dessine autour de la discrimination par la présence symbolique des couleurs, le spectateur assiste avec regret au regroupement de toutes les castes sous les mêmes traits, sans distinction. L'idée finale prônerait donc une uniformisation et non une acceptation de chacun des personnages par les autres : idée franchement inquiétante puisque facilement compréhensible par des plus jeunes...
Ponctuée par des scènes à l'esthétique très soignée tant sur le plan visuel que sonore, notamment lors de la chute du personnage principal hors du tableau, ou durant de sommeil de cette jeune "Pafinie" – scène rappelant fortement le court-métrage de Florentine Grelier : Ru - ... l'intrigue compte aussi et malheureusement ces courtes scènes d'une naïveté frisant l'insupportable, en particulier lorsque le couple s'éternise dans quelques répliques inutiles.
Le Tableau est donc une histoire somme toute agréable, mais particulièrement hétérogène : l'équilibre entre poésie, morale et esthétisme a bien du mal à être établi.