Lee Miller est une figure avant-gardiste, libre-penseuse et surtout profondément humaine qui mérite incontestablement une plus grande mise en lumière. Il s'agit tout de même d'une femme mannequin devenue photographe de guerre: un virage à 180 degrés donc; preuve d'une très grande diversité d'esprit dont peu d'artistes masculins (faisant d'ailleurs partie de ses contemporains) pourraient se vanter. Cette audace et cette rage de vérité en font l'un des témoins les plus importants des atrocités de la Seconde Guerre Mondiale, puisque son travail journalistique a su traverser les époques et permet encore aujourd'hui une plongée visuelle inestimable dans les heures les plus sombres de l'Humanité.
Sur le principe, consacrer un film à Lee Miller est donc une démarche dont on ne peut que saluer l'utilité. En effet, le biopic est un outil efficace de communication culturelle et historique puisqu'il permet de s'informer voire de découvrir des personnages, parcours, événements jusque là potentiellement peu représentés en dehors de canaux de diffusion peut-être moins faciles d'accès tels que la littérature ou encore les musées.
Malgré tout, si Lee est un film à tout le moins instructif, il manque d'une réelle "pertinence cinématographique" à proprement parler, si l'on peut dire. En effet, là où dans l'excellent "Civil War" d'Alex Garland la photographie de guerre était intelligemment intégrée à la narration et devenait ainsi un élément de mise en scène à part entière permettant de se placer à hauteur de personnages, "Lee" se contente de raconter certaines séquences marquantes de la carrière de Lee Miller mais peine à rendre véritablement honneur à toute l'intensité de l'expérience humaine vécue par sa protagoniste.
Peut-être le parcours de Lee Miller est-il trop significatif, trop fort, trop réel, pour être pertinemment et justement restitué à la faveur d'un film s'inscrivant dans des codes hollywoodiens classiques et qui manquent malheureusement d'un peu de saveur et de personnalité.
A noter toutefois que l'interprétation de Kate Winslet n'en demeure pas moins brillante, et retransmet à la perfection toute la beauté et la complexité de son personnage. Une scène en particulier (de loin la plus belle du film, et qui résume à elle-seule la personne et le travail de Lee Miller) en fait même, en définitive, un film à voir.