Quantième Art


Le seul moyen d’imaginer une comédie de la part d’un gars qui a fait une trilogie toute tristoune sur le prolétariat finlandais, c’était qu’il renoue avec l’absurde de Calamari Union, où figuraient d’ailleurs déjà les proto-Leningrad Cowboys. Kaurismäki est responsable de l’existence aussi bien du film que du groupe, ayant eu la chance que son sens de la plaisanterie soit pris au sérieux dans les deux arts & lui permettant de produire cette œuvre parfaitement complémentaire méritant plus que nulle autre l’épithète de comédie musicale.


Création qui ne fait pas exprès d’être internationale, elle est de ces ovnis brillants nés d’une blague prise suffisamment au sérieux pour séduire exactement l’audience qu’il faut pour la rendre mystérieuse & exubérante sans qu’elle se décompose sur place, telle une étude à la fois solide & sans substance dans le registre lynchéen mais cocasse, cohérente en elle-même comme si elle contenait l’entièreté de son propre sous-genre ; comment en serait-on arrivé sinon à faire patauger un idiot du village finlandais dans le bayou de Louisiane à la recherche d’un groupe de polka-jazz-rock nourri d’oignons qui traverse les États-Unis avec des coupes pompadour ?


C’est aussi une œuvre du voyage, qui a le courage d’aborder le genre apparemment infini du road trip afin d’emporter son monde de la taille d’une voiture à des endroits où il pourra exprimer tout le bien-être d’un cinéma libéré, de bric & de broc mais très humain – de quoi retomber sur l’obsession de Kaurismäki pour le monde des travailleurs, mais sous un regard insouciant qui semble vraiment lui & qui commençait à lui faire défaut. C’est non seulement un monument accompli de l’absurde mais une biographie fictive des Leningrad Cowboys qui est… loin d’être fausse.

EowynCwper
8
Écrit par

Créée

le 1 juin 2020

Critique lue 257 fois

1 j'aime

Eowyn Cwper

Écrit par

Critique lue 257 fois

1

D'autres avis sur Leningrad Cowboys Go America

Leningrad Cowboys Go America
Clode
8

Bananes, Cadillac et Rock 'n roll

Un film finlandais sur des rockeurs paumés du fin fond de l’Europe de l’est qui vont aux Sates pour percer et devenir célèbres, le tout accompagné d’un titre épique, comment ne pas être intrigué ...

le 11 août 2014

7 j'aime

Leningrad Cowboys Go America
Cinephile-doux
5

Régiment de bananes

Tourné en plein Glasnost, Leningrad Cowboys go America est une fantaisie burlesque relativement mineure dans la carrière de Kaurismäki. Patiné par le temps, le film se révèle parfois savouraux avec...

le 3 juil. 2018

4 j'aime

Du même critique

Ne coupez pas !
EowynCwper
10

Du pur génie, un cours de cinéma drôle et magnifique

Quand on m’a contacté pour me proposer de voir le film en avant-première, je suis parti avec de gros préjugés : je ne suis pas un grand fan du cinéma japonais, et encore moins de films d’horreur. En...

le 26 oct. 2018

8 j'aime

La Forêt sombre
EowynCwper
3

Critique de La Forêt sombre par Eowyn Cwper

(Pour un maximum d'éléments de contexte, voyez ma critique du premier tome.) Liu Cixin signe une ouverture qui a du mal à renouer avec son style, ce qui est le premier signe avant-coureur d'une...

le 16 juil. 2018

8 j'aime

1

Mélancolie ouvrière
EowynCwper
3

Le non-échec quand il est marqué du sceau de la télé

Si vous entendez dire qu'il y a Cluzet dans ce téléfilm, c'est vrai, mais attention, fiez-vous plutôt à l'affiche car son rôle n'est pas grand. L'œuvre est aussi modeste que son sujet ; Ledoyen porte...

le 25 août 2018

7 j'aime

3