Un film de gangsters mis en scène par Michael Curtiz avec Cagney et Bogart, je ne pouvais décemment pas passer à côté. Et, malgré un a priori positif indéniable, le parcours de Rocky Sullivan, de sa jeunesse à sa mort (il est vrai, à un âge plutôt faible), a réussi l'exploit de me surprendre, et de façon foutrement agréable qui plus est.
Ne vous inquiétez pas trop vite, on retrouve bien ce que l'on aime dans les classiques du genre, la corruption endémique, l'avocat véreux, le boss du crime hargneux, la presse dépitée, les procès, les trahisons, les séances au parloir, les fusillades stylées (le héros passe tout le climax avec deux flingues en akimbo, comme le premier Chow Yun-Fat venu) et violentes (et Dieu sait que le Code Hays mettait des bâtons dans les roues des cinéastes se vouant à cet exercice).
Mais le film se distingue par une certaine fibre sociale, très bien foutue, qui s'illustre par l'histoire dans l'histoire d'une bande de jeunes délinquants ayant pour modèle notre Rocky. Grâce à celle-ci, et sans nuire au reste, le réalisateur rappelle (ce qui est toujours sympathique, et encore plus à notre époque) que le crime est avant tout une affaire de pauvreté, d'ignorance, de groupe, d'exclusion et de circonstances malheureuses, n'en déplaise aux défenseurs des théories ethnico-culturello-génético-religieuses. Alors bien sûr, on n'échappe pas à quelques excès de bien-pensance et autres dialogues didactiques dispensables, mais le tout est empreint d'assez d'authenticité pour que ça passe sans soucis.
Si vous rajoutez à cela une réalisation parfaite, un rythme parfait, des acteurs parfaits, une relation rondement menée entre deux amis s'étant retrouvés dans des directions opposées, une histoire d'amour pas trop lourde (voire mignonne), de l'humour bien placé, vous comprendrez que je me demande si la qualification de "chef d’œuvre" pourrait être utilisée ici.