APRÈS SÉANCE


Quelle nostalgie ! Quelle nostalgie de l'époque où nous avions droit à un univers magique porté par de personnages intéressants, vivant de belles péripéties. Et encore, je vous parle de ça n'étant même pas spécialement fan d'Harry Potter. Comme tout enfant de 9 ans en 2001, j'ai fumé la VHS d'Harry Potter à l'école des sorciers, qui a eu le droit à deux excellentes suites. Devant La Coupe de feu, j'ai regardé Potter droit dans la cicatrice et je lui ai dit : "toi mon p'tit gars, tu ne me reverras plus". Et je m'y suis plus ou moins tenu. Toutefois, je ne peux pas nier la relative qualité de la saga, sa faculté à se développer et à évoluer en même temps que son public. Comment sommes-nous alors arrivés jusqu'à Les animaux fantastiques 2 : Les crimes de Grindelwald ? Un mauvais mouvement de baguette magique, un sort Universalis Etendux lancé de trop et hop, place à l'incohérence et à l'insipidité...


Faut dire que ça partait mal. J.K Rowling annonce fin 2013 que son livre-guide Vie et habitat des animaux fantastiques va être adapté au cinéma. En 2014, il est question d'une trilogie permettant déjà de déceler le problème (jurisprudence The Hobbit...). Mais c'est en 2016 que J.K Rowling craque complètement son slip de moldu en annonçant la sortie de CINQ FILMS ! Plus de dix heures de cinéma basées sur un livre illustré de 96 pages, écrit gros... Bon, il ne restait qu'un miracle pour sauver ce sinistre projet : prendre un scénariste de qualité et d'expérience, capable de pondre une vraie adaptation pertinente. Mais ils ont pris J.K Rowling...


Mangez tous vos mangemorts !


Les animaux fantastiques 2 reprend la suite de Les Animaux fantastiques, jusque-là c'est cohérent. Mais ne vous y habituez pas trop vite parce qu'aux côtés de Norbert Dragonneau (Eddie Redmayne), nous allons notamment retrouver Jacob (Dan Fogler) censé avoir subi un sortilège d'oubliette et Croyance (Ezra Miller) censé être mort, oklm. A la suite de l'évasion du méchant Grindelwald (Johnny Depp), les sorciers se tournent vers Dumbledore (Jude Law), seul magicien assez puissant pour l'arrêter. Comme il n'est pas très très motivé, il envoie à sa place Norbert Dragonneau qui est, je le rappelle, un ancien étudiant sécheur de cours réorienté vers l'écriture zoologique...


Petite aparté : Norbert Dragonneau est-il vraiment le plus puissant des sorciers en activité, seul capable de retrouver Croyance et de combattre Grindelwald ? Les mondes des sorciers et des moldus ne reposent-ils vraiment que sur les épaules d’un zoologiste que tout le monde dénigre ? C’est comme si nous voulions confier à Jammy Gourmaud de C’est pas sorcier (ahah) la gestion du conflit israélo-palestinien, de la réunification des deux Corées et du compte twitter de Donald Trump ! C’est complétement con !


Bref, Norbert va alors devoir retrouver le vivant-mort Croyance avant que Grindelwald ne l'entraine du côté obscur de la magie.



SUR LE FOND : 3 étoiles



Il y avait déjà une grosse faiblesse scénaristique dans le premier opus en raison du matériel de base et de l'incompétence totale de J.K Rowling pour écrire un scénario de film. La perte de tous les animaux fantastiques dans New York et la quête pour les retrouver un à un servaient de prétexte pour construire tant bien que mal une intrigue parallèle reliée aux forceps à Norbert Dragonneau. J.K Rowling est peut-être une romancière talentueuse (du moins célèbre) mais certainement pas scénariste. A l'exception de L’Ordre du Phénix, tous les scripts de la saga Harry Potter ont été rédigés par Steven Kloves, scénariste plusieurs fois nommé à différentes cérémonies pour la qualité de ces œuvres. La saga des animaux fantastiques aura quant à elle le droit qu'à des scénarios bâclés et incohérents, écrits par la personne pouvant trahir l’œuvre de base en soulevant le moins de protestation possible : son propre créateur. Ainsi, Les animaux fantastiques avait un mauvais scénario de film, la suite a hérité d'un mauvais scénario de mauvais non-film.


Parce que non seulement J.K Rowling ne sait pas écrire un film et lui donner un enjeu, non seulement elle a pondu un scénario totalement incohérent par rapport à l'univers d'Harry Potter, mais en plus, Les animaux fantastiques 2 n'est même pas un film ! Je développerai ce dernier point dans la partie FORME, on va déjà s'attarder sur le reste et vous verrai qu'il y a déjà masse à dire...



The moment has come, to take our rightful place in the world, where we
wizards are free. Join me or die.



Côté fan-service outrancier, nous pensions avoir connu le pire avec Solo : A Star Wars Story. Toutefois, même s'il y avait la volonté de tout montrer, tout expliquer, tout relier dans ce dernier, cela ne remettait pas en cause la mythologie de la licence. Ici, il y a une telle soif de greffer la saga des Animaux fantastiques à celle d'Harry Potter, que c'est fait de façon totalement décomplexée en envoyant balader les neuf films précédents.


Ce n'était déjà pas nécessaire d'ajouter le personnage de Nicolas Flanel (Brontis Jodorowsky) pour en faire un running gag de bras cassés (plutôt de mains, en l'occurrence). Ça se sent à cent bornes que la présence du personnage a été décidée avant même de connaitre son utilité. Conséquence : il ne sert strictement à rien, et voir sautiller ce vieux palot m'a personnellement mis mal à l'aise... Mais là, à la limite, ce n’est pas très grave. C’est triste que ces boulets de la Warner ont cru à l’efficacité de cette séquence au point de la mettre dans la bande annonce, mais ce n’est pas grave. En revanche…


En revanche, mentionner trois fois le nom de Minerva McGonagall dans une scène se déroulant en 1927, avant même sa naissance donc, ou sortir du chapeau un enfant de l’oncle de la grand-mère par alliance de la petite cousine de Dumbledore… Ça, c’est grave !


Au diable la cohérence de l’univers donc, l’important est de gaver les potterheads de références inutiles et autres clins d’œil/coups de coude... Ainsi, ils ne verront peut-être pas que les personnages sont tous plus cons que les autres. Norbert Dragonneau est toujours aussi agaçant, avec un catalogue d’expressions aussi fourni que le crane de Vin Diesel. Regard en coin et lèvres pincées pour faire le mystérieux, plus à l’aise avec un dragon d’algues numériques qu’avec Katherine Waterston… Au cas où nous n’aurions pas compris qu’il était seul, incompris, dénigré par tous les autres sorciers. Un blaireau quoi. Ce n’est pas pour rien que c’est un Poufsouffle…


Jacob, seul personnage que je trouvais un peu intéressant dans Les animaux fantastiques parce qu’il personnifiait l’émerveillement d’un moldu face au monde des sorciers (donc les spectateurs), est devenu le comic relief gras de la saga. Ridicule, inutile, stupide pendant les deux heures de film, il forme au moins un couple homogène avec l’hystérique et absurde Queenie (Alison Sudol)


Grindelwald, et son interprète Johnny Depp, sauvent un peu le film. Pas que ce soit une performance de ouf mais au moins, nous ne sommes pas dans le cliché du grand méchant qui veut détruire le monde… Il défend une thèse qu’il croit juste, et il est prêt à la défendre par tous les moyens. C’est un bad guy intéressant mais... Attendez une minute... Mais c'est Magnéto dans X-Men ! Il forme d’ailleurs avec Dumbledore, une ex-bromance inspirée de Luther King et MalcomX comme la relation Charles Xavier/Magnéto. Non c’est vrai, c’est plus que ça. Depuis quelques années, J.K Rowling tente opportunistement de relier son œuvre à des thématiques gayfriendly. N’y voyez là qu’une démarche marketing dégueulasse qui se ressent dans la malaisante scène du pacte de sang. On constate aussi l’Xmenisation de la saga dans les thématiques traitées du coup : la tolérance, l’acceptation de la différence, la volonté de ne plus vivre caché.


Les sorciers ont simplement remplacé les mutants. Je préfère les mutants.



SUR LA FORME : 5,5 étoiles



Après avoir réalisé la seconde moitié de la saga Harry Potter, et après s’être vautré avec Tarzan que j’ai eu la chance de ne pas voir, c’est donc David Yates que le choixpeau a désigné réalisateur de toute la saga Les animaux fantastiques. Avec un budget de 200 millions de dollars, il signe alors la bande annonce la plus chère de l’histoire ! Parce que Les animaux fantastiques 2 n’est ni plus ni moins qu’un trailer XXL teasant les aventures futures. Un épisode creux, de transition, comme les séries n’osent même plus en faire. Et là, ça touche à la forme intrinsèque de ce que « doit » être un film : une exposition, un développement, une résolution. Évidemment, certains films indépendants, expérimentaux, ne respectent pas cette structure en trois actes mais ce n’est clairement pas l’ambition de Les animaux fantastiques 2


Ici, nous avons bien l’élément déclencheur de l’intrigue, à savoir l’évasion de Grindelwald. Mais pendant tout le reste du film, les personnages sont juste trainés dans un scénario complètement tiré par les cheveux n’ayant qu’un seul but : faire patienter le spectateur pendant les 1h30 règlementaires avant de l’assommer avec trente minutes d’explications. Vas-y que Yusuf Kama (William Nadylam) raconte sa prophétie, que Leta Lestrange (Zoë Kravitz) raconte sa vie. Puis, tous les personnages se retrouvent au cimetière du Père Lachaisse, là où Grindelwald a prévu son meeting clandestin. Oh bah ça, ça tombe bien alors ! Le discours de Grindelwald, qui est une bonne scène mais qui ne constitue pas pour autant un climax digne de ce nom, et fin sur des promesses : Oui, Dumbledore va peut-être pouvoir bouger ses fesses. Oui, Grindelwald va peut-être lever une armée. Oui, nous allons peut-être avoir le droit à une belle confrontation dans Les animaux fantastiques 3.


En attendant, on paye tout de même une place de cinéma pour aller voir un non-film qui ne développe même pas son personnage principal et qui n’a aucun intérêt. Les animaux fantastiques 2 tente de capitaliser que sur un fan-service grossier et une promesse de suite. Retirez la saga Harry Potter, et sans Les animaux fantastiques 3, ce non-film est complétement vide.


Est-il beau néanmoins ? Bah pas tant que ça. La photographie n’est pas dégueulasse, mais on reste globalement dans des tons grisâtres, sombres, poussiéreux et brumeux. Avec les costumes et les décors, cela illustre plus ou moins les années 30 industrielles où l’action est censée se dérouler. Le souci avec les décors, c’est qu’ils sont complétement vides. Douze figurants pour représenter Paris, ce n’est quand même pas grand-chose. Ça a au moins le mérite de justifier le pur hasard que Queenie soit recueillie par Vinda Rosier (Poppy Corby-Tuech).



I hate Paris.



Concernant les effets spéciaux, aucun ne m'a vraiment scotché. En revanche, il y en a quelques-uns qui m'ont franchement piqué les yeux. Le dragon de flammes bleues notamment qui n'est là que pour rehausser un peu le niveau du climax, en vain. La menace n'est pas du tout exposée, l'action complètement illisible, et visuellement c'est franchement pas top. Surtout que globalement, le film habitue à des animaux fantastiques de qualité : le niffleur (même si la scène des bébés niffleurs est franchement dispensable, notamment le slowmo...), le botruc, le kelpy et dans une moindre mesure le zouwu. Alors oui, il y a quelques loupés comme les mandragots qui semblent tout droit sortir de Pokemon : Let's go, Pikachu, mais ça va.


Après avoir engrangé plus de 8,5 milliards de dollars au box-office, la saga Harry Potter/Animaux fantastiques accouche de son pire épisode. Au vue des courbes de recettes, la sentence semble déjà être prononcée. Dès le troisième jour d’exploitation, Les animaux fantastiques 2 décroche complètement le premier opus, et n'est sans aucune mesure avec celle d’Harry Potter 7.2. La saga draguant déjà un peu le marché asiatique au vue de l'inspiration des animaux fantastiques, je mets mon billet sur un troisième film centré sur le monde des sorciers chinois. Une nouvelle source de profit, peut-être. En tout état de cause, il est certain que les prochains opus ne pourront proposer que du mieux, les éléments étant ENFIN totalement exposés.


Quoi que, ne sous-estimons pas J.K Rowling, scénariste en herbe...


Bonus acteur : NON


Malus acteur : NON



NOTE TOTALE : 4 étoiles


Spockyface
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le 27 nov. 2018

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