J’ai rarement été seul dans une salle de cinéma – ça a pourtant été le cas pour Les Apaches. Tourné en 4/3, avec probablement un budget quasi amateur (on se doute qu’il n’y avait qu’une seule caméra sur le tournage quand on voit qu’il n’y a que très peu de plans différents), avec des inconnus, cette histoire de « Cinq adolescents qui pénètrent dans la maison d’une dame qui, lorsqu’elle s’en aperçoit, prévient un mafieux local » ressemble souvent à du cinéma amateur.
Le film se passe en Corse, et au lieu de perdre son temps à montrer de jolis paysages, les jolies plages et les bars-hôtels-restaurants, Les Apaches s’intéresse plus à la réalité sociale des banlieues corses. Le film part moyennement bien : la première demi-heure est cousue de fil blanc. Rarement intéressante, un peu bancale par moments, vite ennuyante de par son aspect ultra-amateur qui rend parfois le tout difficilement digeste, tout le monde aura un peu de mal à rentrer dans l’histoire. Cette première partie est pourtant suivie d’une deuxième, d’une demi-heure aussi, et c’est réellement là que le film devient vraiment intéressant : on passe de cinéma amateur trop ambitieux à un réalisme social qui fait évidemment penser à The Wire, dont on retrouve tous les éléments : absence totale de manichéisme, scènes d’un réalisme impensable, saleté de la rue et de la banlieue… J’y ai pensé tout ce temps, Les Apaches se rapprochait à de nombreuses reprises de la série de David Simon. La comparaison est d’autant plus forte que le sujet tout comme son traitement fait penser à l’incroyable Saison 4 du show de HBO : cercle d’amis, milieu de la rue… sans pour autant égaler ses moments de génie.
Mais sur cette impression se chevauche une autre : si la comparaison avec The Wire est toujours d’actualité dans les dernières vingt minutes, une deuxième comparaison vient se faire sa place après un gros bouleversement du film : pour ces dernières minutes qui tiennent du génie, on se retrouve devant un Stand By Me inversé, porté par des jeunes acteurs excellents et une intelligence assez incroyable, portant un regard pessimiste sur des réalités sociales évidentes. Pour cette dernière partie, on nous propose une vision véritablement novatrice sur de nombreux problèmes de société actuels. Les Apaches ne fait pas de concession et se concentre sur des éléments maîtrisés et probablement connus du réalisateur.
Malgré ses défauts, la dernière partie des Apaches permet de juger le film autrement : le réalisateur utilise la limite de ses moyens pour rendre le film autrement plus réaliste et plus fort. On regrette juste que tout le film ne soit pas à la hauteur de ces vingt dernières minutes. Cependant, on reste dubitatifs quant au fait d’aller voir un tel film en salles de cinéma, tant un format DVD est largement plus adéquat. Une belle petite curiosité.