Les Contes de Terremer
6.2
Les Contes de Terremer

Long-métrage d'animation de Gorō Miyazaki (2006)

Tout est à craindre, parait-il, lorsque c'est le fils d'un réalisateur de dessins animés plus que célèbre qui, à son tour, suit les traces de son père. Et pour cause, Les Contes de Terremer, à l'origine livre de chevet de son père (de l'écrivaine États-unienne Ursula K.Le Guin) est ici le matériau premier du fils. Du Miyazaki "bis", où Goro serait évidemment, pour ne pas dire fatalement, moins bon que son père expérimenté, au sommet de son art depuis quelques années déjà. De ce point de vue, oui, on peut estimer Goro comme moins bon, et ce film également, que l'œuvre entière de son père.

Ce serait néanmoins se tromper que d'essayer de vouloir à tout prix confondre le père et le fils pour pointer ce que le fils n'est pas capable de faire. Là où il faudrait regarder, c'est ce que le fils apporte à cette adaptation, en réaction même par rapport à son père, grâce à la réappropriation à son compte de l'œuvre inspiratrice.
Si Miyazaki Hayao peut être considéré comme un enchanteur, Les Contes de Terremer apparaissent comme étant désenchantés, ce qui en fait d'ailleurs tout l'intérêt, son excellence. Le fils appartient à une nouvelle génération où l'idéalisation, mêlé de naïveté et d'innocence, typique du père, n'est plus.
Dans Les Contes de Terremer, Miyazaki Goro désidéalise l'univers de son père et le confronte à un monde sobre (les effets baroques du père sont supprimés) et sombre. Le parcours initiatique n'existe pas, puisque le personnage principal commet plusieurs fois la même erreur, pour être finalement sauvé par l'ombre de lui-même. La peur qui fait la lie de ce film est invisible, sourde, innommable. Et tous les personnages ont des souffrances à dire qu'ils taisent : en premier lieu la culpabilité qui étouffe le héros. Mais Miyazaki fils va plus loin, et c'est avec beaucoup de pudeur qu'il traite des agressions sexuelles, des rouages secrets qui font la prospérité des villes (l'esclavagisme), des traumatismes des enfants.

Oui, l'œuvre est académique et on sent un fils en plein apprentissage dans les références de son père (il fait d'ailleurs un bon artisan), mais sa focale est différente et ouvre une nouvelle voie pour les studio Ghibli. Non, Miyazaki Goro n'est pas le successeur de son père et le sera sans doute jamais (Miyazaki père n'aime pas le film de son fils). Et finalement... c'est la meilleur chose qui puisse arriver quand on est le "fils de". Les Contes de Terremer montrent à quel point Miyazaki Goro est différent et excellent... dans son style.
numerimaniac
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le 18 oct. 2010

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numerimaniac

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