Les Forçats de la gloire, titre français totalement tronqué de ce qui est l'un des plus grands films de guerre jamais réalisé. Story Of G.I. Joe, de son titre original, étant l'un des rares films tournés pendant la seconde guerre mondiale, puisqu'il date de 1945, a posé un regard réaliste et totalement distant de toute grandiloquence victorieuse, comme il était de coutume de produire tout un tas d’œuvres à l'époque.
Ici, le vétéran William A. Wellman, l'un des plus grands cinéastes de l'âge d'or Hollywoodien, et véritable pilote d'avion pendant la première guerre mondiale livre un regard réaliste et désenchanté sur les horreurs et les conséquences directes qu'à la guerre sur les hommes.
En vétéran coutumier du fait, Il prend immédiatement toute distance avec l'héroïsme et le patriotisme exacerbé que de nombreux films de propagande avaient mis outrageusement en avant à l'époque, pour soutenir l'effort de guerre comme ils disaient...
L'ennemi est très peu visible, même s'il représente le danger direct, le cinéaste ne le montre que lors d'une mémorable scène de combat urbain qui, j'en suis convaincu, a fortement inspiré Stanley Kubrick pour Full Metal Jacket.
Un peu à la manière de John Ford ou Howard Hawks, cinéaste de la même trempe, c'est la notion de groupe et la vie qui en découle, qui intéresse le réalisateur de The Ox-Bow Incident. Il scrute les visages d'hommes qui essaient de garder un semblant de raison dans cette atrocité faite d'explosions, de terres boueuses et de corps déchiquetés.
Suivant l'odyssée d'un groupe de soldats représentant toutes les couches de la société américaine, mené par un officier désabusé et cynique, mais juste, interprété par Robert Mitchum, qu'un correspondant de guerre à qui Burgess Meredith (le futur Mickey de Rocky) prête ses traits, suit dans ses pérégrinations.
Ce film possède une grande puissance d'évocation découlant naturellement d'une mise en scène filmant au plus près les évènements, sans jamais obnubiler, je dirais même en ne s'intéressant exclusivement qu'aux réactions des hommes, victimes broyées par l’implacable et irrationnelles dureté des combats.
Beaucoup de symboliques jonchent le film afin de le sublimer, comme ce petit chien qui passe de bras en bras au gré de soldats qui finissent tous par périr, comme une sorte de flambeau emprunt de fatalité, d'objet de mort
Wellman n'oublie pas de mâtiner son film de quelques scènes plus légères, voir franchement hilarantes, notamment cette scène où l'un des protagonistes demande aux habitants d'une petite ville que les GI's viennent de libérer qu'ils lui fournissent un tourne-disque, ou une scène aux accents romanesques où après le mariage d'un des leurs, ses camarades improvisent une chambre nuptiale de fortune dans une vieille remorque de camion.
Le regard que porte ce cinéaste sur ces hommes dans la guerre, porte indéniablement le sceau des plus grands cinéastes qui pensent avant de filmer.
Une œuvre visionnaire et un regard réaliste de la part d'un cinéaste qui en inspirera beaucoup d'autre dans leur manière d'appréhender le thème de la guerre.