Les graines du figuier sauvage aborde des problèmes intéressants et les traite, dans une certaine mesure, de façon pertinente. On retrouve, en trame de fond, la question de la banalité du mal - décidément à la mode au cinéma ces derniers temps. Un honnête père de famille iranien entretient une vie de bureaucrate confortable en faisant incarcérer et exécuter femmes et hommes dont le seul crime est d'être en désaccord avec le régime en place. Dans quelle mesure est-ce supportable ? Est-on, ou non, du côté du personnage ? Le film ne répond pas à ces question pendant un long moment ; et c'est tant mieux.


En trame de fond, bien sûr, on retrouve la question de la théocratie et du patriarcat. Un peu comme dans Les filles d'Olfa, il apparaît que la religion se pose comme un prétexte, une justification, de l'exercice d'un pouvoir patriarcal sans partage, qui s'efforce de reléguer les femmes aux tâches subalternes. Là le film est cool. Les deux filles de notre petit juge iranien, contrairement à papa et maman, sont progressistes, et entendent bien brûler leur voile et, avec lui, la domination des hommes sur les femmes. Et tout ceci fonctionne plutôt bien pendant les deux premières heures, dans une sorte de quasi huis clos dans lequel on accompagne ces trois femmes, en proie à des contradictions politiques et sociales fortes mais qui, unies par le lien familial, ne se font pas la guerre.


Pendant ce temps le père bosse et se charge d'éliminer les racailles et autres traînées qui mettent en péril le pouvoir divin. On connaît la chanson.


Malheureusement, dans la dernière partie du film, tout part en fumée. Les graines du figuier sauvage se transforme en un thriller cheap qui accumule tous les mauvais clichés du genre :

Mention spéciale à la scène finale quand, poursuivies par leur père, elles décident, allez savoir pourquoi (pour le scénario, sans doute) de se séparer. C'est le malaise.

A partir de là, le film devient totalement prisonnier de son scénario. S'enchaînent les facilités d'écritures plus déconcertantes les unes que les autres. On frise le nanard.


C'est dommage, car il y avait vraiment du potentiel ici. Et le sujet et l'esthétique du film auraient pu en faire un chef d'oeuvre. Raté.

Doomit
6
Écrit par

Créée

le 23 sept. 2024

Critique lue 326 fois

8 j'aime

Doomit

Écrit par

Critique lue 326 fois

8

D'autres avis sur Les Graines du figuier sauvage

Les Graines du figuier sauvage
Plume231
8

Femme, Vie, Liberté !

Les Graines du figuier sauvage est un hommage vibrant à une partie non négligeable de la population iranienne qui se révolte, avec un courage incroyable, contre une théocratie en putréfaction,...

le 19 sept. 2024

41 j'aime

7

Les Graines du figuier sauvage
Cinephile-doux
8

Femme, Vie, Liberté

Malgré son titre à la Nuri Bilge Ceylan, il est évident que Les graines du figuier sauvage, réalisé par Mohammad Rasoulof, sert une ambition plus politique que poétique, dans l'actualité d'un pays,...

le 5 juil. 2024

24 j'aime

2

Les Graines du figuier sauvage
Albiche
8

Femme, filles, l'Iman berné

Les Graines du figuier sauvage fait partie de ce genre de films pour lesquels il est essentiel de connaître le contexte de leur création, non pas pour mieux les apprécier (les qualités intrinsèques...

le 11 sept. 2024

21 j'aime

4

Du même critique

Les Chambres rouges
Doomit
8

Présumé innocent

On sort rarement d'une salle obscure retourné après avoir vu un mauvais film. Le choc est tel qu'il est difficile de décrocher un mot.C'est un film de procès, mais qui use de ficelles originales. Le...

le 4 févr. 2024

7 j'aime

Pas de vagues
Doomit
2

Pas La salle des profs

Quand on prend l'habitude de voir des bons films, on a forcément du mal avec Pas de vagues. D'aucuns diront qu'il souffre de la comparaison avec La salle des profs mais, en réalité, il n'y a aucune...

le 27 mars 2024

3 j'aime

3

La Mécanique des fluides
Doomit
6

Enfonçons des portes ouvertes

Le césar du meilleur court métrage documentaire est un joyeux bordel à l'esthétique discutable.Se multiplient les enfonçages de portes ouvertes sur le fond d'un texte mélo écrit, dirait-on, par un...

le 25 févr. 2024

3 j'aime