"Femme, vie, liberté", reprennent en cœur les manifestantes iraniennes depuis septembre 2022 et l'assassinat de Mahsa Amini par le régime des Mollah pour manquement à l'obligation de porter le voile. C'est sur ces événements de colère, de soulèvement, de doute que revient ce film réalisé par M. Rasoulof, notamment lauréat d'un prix spécial à Cannes cette année.
Le long métrage met en scène Iman, père de famille nouvellement promu enquêteur (haute fonction judicaire), ainsi que le dilemme qui le poursuit, lui et sa femme: faut-il coopérer avec un régime considérant l'arbitraire comme un moyen politique légitime? Après une brève remise en question, le personnage cède progressivement aux arguments théologiques du régime. Si au départ la résignation l'emporte, il devient peu à peu défenseur de celui-ci, notamment contre ses filles et sa femme, qui prennent assez rapidement le premier rôle.
La condition des femmes donc, est évidemment un des thème centraux. Un des mots qui revient le plus est l'injonction "assis!, énoncée en direction des femmes et qui rappelle la hiérarchie imposée: celles-ci sont réduites à des animaux, à des choses. C'est la raison pour laquelle elles se battent: plus qu'une histoire de bout de tissus, l'enjeu ici est pour elles de défendre leur humanité, et cela passe par le geste symbolique du retrait du voile.
La famille au centre du récit est une métaphore: les filles représentent la jeunesse révoltée, la mère les femmes hésitantes et le père le régime du pays. Ainsi, ce dernier finit par se radicaliser et s'en prend physiquement à sa propre famille, non sans rappeler la répression des manifestations. A mon avis la personnification va plus loin: en plus de l'Etat, le père reflète également la religion. Alors si les filles finissent par vaincre ce dernier, bien que dans la douleur et sans avoir d'alternative, c'est à la religion qu'elles viennent inconsciemment de porter un coup fatal.