Tous ceux qui comme moi ont gardé un souvenir pénible de "Ben-Hur" ont tout intérêt à dépasser leurs préjugés pour visiter l'œuvre de ce mulhousien de naissance : William Wyler fut en effet l'un des plus grands metteurs en scène d'Hollywood, toutes périodes confondues. Sa filmo, pas toujours égale, révèle de très belles réussites, quelques chefs d'œuvre en costumes ("L'Héritière", "L'Insoumise"...), et une constance dans l'élégance et le savoir-faire pour laquelle un minimum de respect est requis.

Ce western tourné en 58 (soit un an avant Ben-Hur) ne fait pas exception. On y voit un Gregory Peck retraité de la Marine débarquer dans l'Ouest sauvage pour y rejoindre sa fiancée (Caroll Baker). La belle est la fille d'un propriétaire terrien en bisbille avec un autre, moins puissant mais tout aussi coriace. L'histoire montre l'opposition entre ces personnages avec au milieu Peck, dont le caractère et les principes sont à mille lieues de ce monde westernien. Il tombe sur un rival particulièrement difficile (Charlton Heston) qui lui donnera du fil à retordre, et devra résoudre le conflit entre les chefs de clan en essayant d'éviter le carnage.

Le titre annonce la couleur : le travail sur l'espace est au centre du film. On retrouve la qualité de la composition chez Wyler. De superbes plans restituent l'immensité des paysages, avec un travail sur les courbes et les couleurs qui en tempèrent la rudesse pour retrouver un peu de la douceur du personnage de Peck. Ce dernier se rapproche d'un autre caractère Wylerien, le Gary Cooper de "La Loi du Seigneur" : un taiseux faussement bougon qui entretient à l'abri du regard des réserves de courage et d'humanisme.

Tempo lent, mise en scène au cordeau : là où un autre se contente d'expédier les scènes de seconde importance, Wyler soigne le moindre détail, ce qui lui permet, sur un scénario à méandres, de donner à son film une tenue égale et fluide. Mais son talent principal réside dans le jeu et la direction d'acteurs, mis au service du film et des personnages de façon toujours juste (on se rappelle de ce qu'il est parvenu à faire avec Kirk Douglas dans "Detective Story"). La distribution est impeccable (Peck, va sans dire, les autres idem, et même Burl Ives : rendu presque touchant). On aura droit, entre autres scènes, à une baston aux aurores avec un chouette montage de plans lointains et rapprochés dans une lumière en clair-obscur, et même à une déclaration d'amour entièrement muette, juste avec les yeux (à l'intérieur en plus d'une scène de suspense). Fortiche.
Artobal
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le 1 nov. 2022

Modifiée

le 29 mai 2011

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