Ça fait cher le morceau de chair à l'écran si c'est qu'on attend de cette pellicule

Les plaisirs de la chair est particulier à bien des égards. De son arrivée précoce dans le cinéma japonais (qui proposera nombre de grands films traitant de l'érotisme ou du rapport à la sexualité dans les années qui suivent) à son inscription dans la filmographie d'un réalisateur de renom, tout laisse à imaginer un film libre et précurseur.


Pourtant, le résultat s'avère assez décevant. L'exposition de la situation initiale est bien trop rapide tout d'abord: on voit la complexité et le problème moral s'installer par de sympathiques idées de mise en scène (dénuer de tout effet sonore la scène de la femme aimée lorsque le personnage principal la revoit, après avoir tué en secret pour elle, appuyant ainsi la liberté et l'innocence d'une femme, tout ce que cherchera à avoir près de lui l'homme), mais voilà que le dilemme est déjà posé et que les problèmes du film pointent le bout de leur nez.
Parlons en ce de dilemme: l'homme a tué celui qui a violé celle qu'il aime / elle part pour un autre / quelqu'un a vu le meurtre et lui demande de garder 30 millions de yen le temps qu'il sorte de prison et si il refuse ou les dépense, il le dénonce. On aurait pu avoir un film imprégné des codes du film noir, tout laisse à le penser, ou au moins, une inspiration de ce genre, dans le but de pousser la morale de l'homme pris au piège. Malheureusement, ici, notre personnage principal choisir de claquer la thune dans une pute et se suicider dans un an, quand l'homme sorti de zonzon viendra chercher les billets verts.
Ce premier choix saugrenu n'annonce rien qui vaille et le segment principal du film ne sera qu'une succession de scènes peu intéressantes, avec une distanciation entre le spectateur et les personnages qui rend tout développement moral ou personnel superflu. Les scènes où le corps est censé être magnifié n'arrivent pas, à l'exception d'un travelling magnifique, je le reconnais: dans une maison japonaise, il pleut. Dans l'angle bas à gauche, le visage de la prostituée engagée pour un an semble prendre du plaisir, dans un mouvement de va-et-viens continu. Le plan dure quelques secondes, ce choix de cadre donne l'air d'un instant de flottement, d'incompréhension. Un travelling montre enfin ces deux personnages, qui ne sont en fait pas en train de copuler. L'homme brûle le pied de la femme avec la cigarette. Tout le monde est à bout.


Puis vient un dénouement qui redonne de l'intérêt au scénario qu'on croyait avoir oublié, avec un tragique certain, amenant que trop tard ce que tout le monde désirait voir.


Ce film reste une oeuvre qui vaut le coup: c'est plutôt bien filmé, le titre n'est en réalité pas tant porté sur le désir sexuel mais peut-être sur la chair dans ce qu'on peut y sacrifier (faire de la prison un petit moment pour ensuite sortir de sa condition sociale, se prostituer pour les besoins des autres, tuer pour l'amour de sa vie... tout cela n'est-il pas qu'un calcul dans la vue d'un/de plaisir(s) de la chair d'un autre?), mais il arrive peut-être un poil trop tôt dans le cinéma asiatique, manquant la grande révolution érotique de la décennie suivante...

morenoxxx
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le 17 févr. 2021

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morenoxxx

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