« Les quatre cavaliers de l’apocalypse » est le dernier grand chef d’œuvre réalisé par Vincente Minnelli. Il met en scène la destruction d’une richissime famille. La première partie se déroule en Argentine, berceau des Madariaga, dont les deux filles ont épousés un européen, l’une un français, l’autre un aristrocrate allemand. Dun côté la branche française, Julio (Glen Ford) peintre amoureux de l’art (ses tableaux exposés dans son appartement sont de Vincente Minnelli lui-même), play boy renomé, indifférent à l’occupation dont le désir profond est de séduire Madame Laurier dont il est tombé amoureux. Et ça tombe bien, son mari parti sur le front Belge est capturé et envoyé en Allemagne comme prisonnier. Comme le rêve du patriarche (Lee J. Cobb) de voir la famille réunie, s’est brisé sur l’engagement des Allemands dans le parti nazi, Heinrich Von Hartrott, son petit fils a abandonné ses études de médecine pour devenir colonel dans la SS, comme celui de la petite fille Chi-Chi (Yvette Mimieux toujours aussi délicieuse) si enjouée et innocente, qui a rejoint la résistance va s’arrêter par la gestapo, le rêve d’amour de Julio et Marguerite Laurier (Ingrid Thulin) va s’évanouir dans la réalité de la guerre. Comme également celui de grandeur de Karl Von Hartrott (Paul Lukas) devant le carnage familial (scène poignante lorsque les quatre parents sont réunis). Son constat désespéré répond à l’accablement de Marcelo Desnoyers (Charles Boyer). Car Karl redoute la tragédie qui va réunir les deux cousins. Tellement semblables, au delà des voies séparées qu’ils ont empruntées. Ils sont bien du même monde lorsque juste avant les bombes, Julio lève son verre face à Heinrich. A la fois film de guerre, entrecoupé d’image d’archives teintes en rouge sang, mélodrame sans issue et tragédie inéluctable, jalonnée par les quatre cavaliers de l’apocalypse, pas un instant qui ne frise le sublime, tout en alternant les moments de bravoure (le diner en Argentine, le défilé sur les Champs Elysées, la rafle, l’opposition avec Von Kleig, le bombardement) et de grâce (la clef, la dernière étreinte de Julio avec son père, l’amour impossible que les deux cousins éprouvent l’un pour l’autre, l’entrevue entre Julio et Etienne Laurier,.. ). Dire que la mise en scène est d’une élégance et d’une virtuosité rares n’est pas une surprise chez le réalisateur, ni le soin apporté aux décors et à la couleur, sans oublier la musique grandiose d’André Previn (avec tonalité très Miklos Rozsà), comme sa direction d’acteur parfaite. Toutefois, le très bon Glenn Ford, un peu âgé pour le rôle, ne correspondait pas aux désirs de Minnelli qui voulait absolument Alain Delon, parfait alter ego latin au germanique Karlheinz Böhm. Mais la production ne voulait pas faire reposer un tel budget sur une seule star : Charles Boyer (les autres étaient soit des inconnus aux Etats Unis, comme Karlheinz Böhm, soit des seconds rôles). Sombre, flamboyant, déchirant et sensible. Cette adaptation dépoussiérée du Roman de Vicente Blasco Ibáñez est tout simplement Magnifique.