Les Sept de Chicago est un grand film de procès, aussi prenant qu’éminemment politique.
A travers ce fait historique méconnu, Aaron Sorkin fait fortement résonner le passé récent de son pays avec les maux qui le rongent actuellement et les divisions qui menacent son unité déjà bien fragile. Avec sa virtuosité de dialoguiste, il signe un plaidoyer démocrate galvanisant pour la liberté d’expression, le droit à la contestation et le combat pour l’égalité civique.
Le film accompagne sept (en fait huit) activistes des différents courants anti-guerre au Viêt-Nam, (anarchistes, démocrates pacifistes, membre des Black Panther), lors d’un procès qui semble joué d’avance, l’administration Nixon ayant la ferme intention de leur faire endosser la responsabilité d’émeutes sanglantes ayant eu lieu en marge du congrès Démocrates de Chicago.
Les événements souvent invraisemblables qui vont émailler le procès, souvent du fait d’un juge dépassé aussi autoritaire qu’incompétent, prêteraient à rire s’ils n’étaient pas la plupart du temps révoltants.
La mise en scène est toute en dynamisme, une volonté imprimée dès son introduction, sautant souvent d’un témoignage à un autre, alternant flash-backs et intenses confrontations. Elle n’a peut-être pas le même brio que lorsque Sorkin confie ses scénarios à d’autres mains (au hasard celles de Fincher), mais elle est parfaitement adaptée à cet haletant film de prétoire. Cette histoire se prête sans aucun doute bien mieux à son sens inné des dialogues que sa première réalisation (Le Grand Jeu) aux enjeux bien peu emballants.
Et pour servir l’écriture ciselée et imparable de Sorkin, il s’est entouré d’un casting étincelant. Joseph Gordon-Levitt, Mark Rylance, Jeremy Strong, Frank Langella… chacun y joue sa partition à la perfection, même Eddie Redmayne, dépouillé son jeu affecté et presque convaincant. Mais c’est un Sacha Baron Cohen totalement investi, naviguant entre impertinence et élans humanistes qui fait la plus forte impression. Il sera amusant de retrouver son Borat dans quelques jours dans un projet cinématographique à l’opposé de celui de Sorkin mais aux intentions quasi-similaires.
Car c’est bien de la liberté d’expression, du combat contre les arrangements politiques, de la dénonciation de mensonges d’état dont Les Sept de Chicago traite avec un équilibre remarquable entre légèreté, responsabilité et engagement civique.
Des notions qui seront au cœur des prochaines élections présidentielles américaines dans quelques semaines.
Après la très vive émotion qu’il parvient à créer dans l’acte final des Sept de Chicago, Sorkin lance un appel en forme d’incantation : THE ALL WORLD WATCHING.