Les Tribulations d'un Chinois en Chine ou De Broca tentant de refaire L'Homme de Rio plutôt que d'adapter l'oeuvre d'un des plus célèbres auteurs du XIXe siècle.
Certes, le début fait penser au commencement du roman à savoir le spectateur découvrant le personnage d'un milliardaire las et suicidaire.
Cependant, contrairement à l'oeuvre papier, le milliardaire du film ne vit pas au XIXe siècle, n'est pas chinois et ne s'appelle pas Kin-Fo.
À la place, nous avons Arthur, milliardaire français des années soixante faisant une escale en Chine durant un long voyage censé lui redonner le goût de vivre. Et il n'y a également aucun personnage du roman.
Ainsi, Les Tribulations d'un Chinois en Chine n'a du roman de Jules Verne que le nom le film préférant faire sa propre histoire d'aventure.
Mais, en tant que tel, le film est-il aussi réussi que L'Homme de Rio? Ben, pas vraiment.
Certes, on a encore Belmondo en protagoniste principal, des scènes d'action ainsi qu'un thème principal composé par Georges Delerue ayant aussi créé celui de L'Homme de Rio.
https://www.youtube.com/watch?v=9oy_AHw-WUM
Malheureusement, la mayonnaise ne prend pas. Pourquoi? Parce que contrairement à L'Homme de Rio qui s'inspirait de l'univers d'Hergé tout en parvenant à être un scénario original, Les Tribulations d'un Chinois en Chine ne semble être qu'une suite de références à Tintin durant des péripéties s'enchaînant de façon si bordélique qu'on ne sait plus ce que le film raconte.
Ainsi on se retrouve avec tout ceci
-Périple débutant en Chine, une tentative de sauvetage du protagoniste via transports en panier_Le Lotus bleu (et ça n'est pas en remplaçant Shanghai par Hong Kong qu'on va se faire avoir)
-Présences d'hommes poursuivant le héros avec des armes, héros s'accrochant à des branches et chute dans la mer d'un duo pas malin_L'Île Noire
-Des personnages piégés dans les maillons d'un bateau, étant traités de profanateurs par les habitants du pays où ils voyagent, une jungle, un bûcher_Les 7 Boules de cristal/Le Temple du soleil
-Une artiste de scène protégeant le protagoniste, une poursuite durant laquelle les protagonistes évitent des balles touchant le sol à la manière de mines explosives, un canon faisant penser à un char d'assaut_L'Affaire Tournesol
-Voyage en Inde, cercueils dans la mer, cales remplies d'opium_Les Cigares du Pharaon
-Mention du Yéti, voyage dans des montagnes enneigées_Tintin au Tibet
-Enlèvement du héros par la population qu'il visite, se retrouve attaché par des ennemis_L'Oreille Cassée
-Tentative de meurtre du héros à distance avec un fusil_Tintin en Amérique
-Provocation d'un accident par un duo de comic-reliefs pas malins_Tintin au Pays de l'Or Noir
-Poursuite en moto, duo de personnages stupides détruisant involontairement des objets à proximité_Le Sceptre d'Ottokar
-Des vapeurs de substances illégales provoquant des étourdissement_Le crabe aux pinces d'or (et ce n'est pas en remplaçant les vapeurs d'alcool par des vapeurs d'opium qu'on ne va pas comprendre la référence)
-Une bagarre en avion_Tintin et le Mystère de la Toison d'or
Certes, comme dit plus haut, il y avait déjà des références à Tintin dans L'Homme de Rio. Cependant, celles-ci étaient plus discrètes et le film parvenait à avoir une intrigue originale avec des personnages n'ayant rien à voir avec l'univers d'Hergé. Hors, dans Les Tribulations d'un Chinois en Chine, l'univers de Tintin est présent de façon bien trop évidente avec les personnages gaffeurs de Cornac et Roquentin étant des substituts évidents de Dupond et Dupont.
Certes, Paul Préboist et Mario David font beaucoup rire par leurs présences et rendent ces personnages appréciables mais il est impossible de ne pas faire abstraction de cette évidence trop flagrante quand on regarde du film.
De plus, Jean Rochefort interprète un majordome dont l'allure est clairement inspirée de Nestor.
Puisqu'on parle du casting. C'est vraiment grâce aux acteurs que Les Tribulations d'un Chinois en Chine vaut le coup d'oeil. Déjà, Belmondo interprète de façon très juste un protagoniste commençant aigri et n'aimant pas la vie avant de devenir heureux et empli de joie de vivre au fur et à mesure des aventures qu'il traverse.
Sans compter le fait qu'Ursula Andress est parfaite en danseuse de cabaret à la fois railleuse et sentimentale. Et n'oublions pas Valéry Inkijinoff en Mr. Goh touchant de par sa bienveillance et tendresse envers le héros dont il veut prendre soin malgré ses bêtises tout en le raillant pour ses défauts désagréables.
Quant aux autres personnages, ils sont assez anecdotiques et oubliables. Cependant, il y en a un qu'on ne peut pas oublier mais pour de mauvaises raisons. En effet, Joe Saïd interprète un pseudo mafieux caricatural et agaçant étant tout le temps irritant à chacune de ses apparitions où il se mets en colère, crie et rit de façon ridicule.
Cependant, malgré ces qualités, le film de De Broca est bien trop bordélique pour pouvoir être pleinement apprécié. En effet, contrairement à L'Homme de Rio qui a un fil rouge cohérent du début à la fin, Les Tribulations d'un Chinois en Chine n'a pas de narration cohérente et n'est qu'une suite de péripéties pseudos-tintiniesques sans originalité. Ainsi, De Broca et le scénariste Daniel Boulanger semblent s'être contentés de feuilleter les pages d'Hergé et de les transposer dans le script du film sans se soucier réellement du scénario qu'il est censé raconter.
Toutefois, il serait de mauvaise foi de dire que le film se résume à ses références. En effet, contrairement à Tintin étant un univers pudique, Les Tribulations d'un Chinois en Chine ne l'est pas du tout. Ainsi, il y a des flirts, de la nudité, des allusions au sexe, des déclarations d'amour audacieuses ou encore du désir à peine suggéré.
Sans compter des scènes de strip-tease provocatrices.
Néanmoins, tout ceci ne suffit pas pour que Les Tribulations d'un Chinois en Chine soit un film mémorable. Il est juste sympathique sans plus et permets de se détendre mais il est loin d'arriver à la cheville de L'Homme de Rio.
Dommage!