Ce qui frappe d’emblée ici est le soin apporté à l’ensemble : des décors aux costumes en passant par les paysages, tout semble avoir été étudié à la perfection. L’immersion est à ce titre totale dans une époque auparavant peu mise en avant au cinéma avec ses caractéristiques, ses coutumes, sa culture (avec un côté bestial bien mis en images). Sur la forme, le film est absolument incroyable. Le travail de Jack Cardiff à la photographie est dantesque, certains plans d’une beauté renversante et les scènes d’action sont parfaitement orchestrées (la bataille finale est une leçon de cinéma). Kirk Douglas domine la distribution et il est un viking tout à fait crédible. Si Janet Leigh compose une adorable princesse et Ernest Borgnine un joyeux roi paillard, Tony Curtis dénote quelque peu. Autant il est tout à fait crédible dans des rôles d’aventurier bondissant (Le Voleur de Tanger ou Le Fils d’Ali Baba), autant il paraît un peu frêle pour tenir la dragée haute à un Kirk Douglas qui en jette vraiment.
C’est cependant principalement sur le fond que le film déçoit. Alors qu’une tragédie se noue formidablement jusqu’à un climax qui doit déclencher une résolution en apothéose, les enjeux sont sous-exploités voire jetés à la cave pour aboutir à un triste combat pour les beaux yeux d’une femme. Toute la complexité de certains personnages est sacrifiée à une péripétie binaire broyée dans un tour de passe-passe scénaristique qui utilise l’alibi de la vengeance pour finalement l’oublier. La disparition de personnages importants comme le lord anglais qui a trahi et un final qui oublie de dire les conséquences des derniers événements (elles peuvent être de plusieurs ordres) constitue une carence.
Là où on attendait un final où l'ambiguïté de certains personnages aurait pu sublimer un remarquable point de départ, on se retrouve malheureusement avec un film qui simplifie tout à l’extrême. Ajoutons à cela un vilain et fourbe roi d’Angleterre, des vikings au tempérament un peu simpliste, une jolie princesse et deux amoureux qui se détestent, on retombe sur un canevas caricatural. Cela ne gâche pas tout car l’aventure est au rendez-vous mais si le scénario avait su habilement exploiter son potentiel et s’aligner sur la perfection de sa réalisation, on aurait eu un authentique chef d’œuvre au lieu d’un simple bon film hollywoodien à l’ancienne.