« Like someone in love » est le titre d'une chanson célèbre interprétée par Ella Fitzgerald.
Ce titre-clin d’œil à l'Occident est comme un tatouage sur ce film réalisé à Tokyo. Le cinéma de Kiarostami bascule avec élégance et minimalisme dans un monde moderne et urbain, qu'il observe par le biais de ces longs déplacements en voiture, et par le truchement des lieux intérieurs clos (café, appartement, garage). Le film se compose de 8 ou 9 plans longs, d'une virtuosité telle que l'on a l'impression d'assister a un film fait d'un seul et unique plan. Ces très beaux travellings dans la ville la nuit jouent habilement avec toutes les possibilités qu'offre un véhicule en mouvement : perception de l' intérieur ou de l'extérieur, reflets, gros plans sur les visages des personnages, filmés souvent seuls, de face ou de profil même pendant les dialogues, surimpressions abstraites sur les vitres des lumières de la ville. Cette façon qu'a Kiarostami d'utiliser toutes les possibilités d'incrustation d'une autre image dans ses plans (vitres, miroirs, écran de télévision, rétroviseurs, écrans d'interphones) ajoute une complexité discrète au film. Les scènes d'intérieur dévoilent des décors bien éloignés de la tradition japonaise, on y boit du champagne, on y écoute un jazz vocal américain et le seul tableau montré est peint à la façon occidentale. Le film est aussi un constat sur la condition de la femme au Japon contemporain qui est loin d'être reluisante. Kiarostami sait aussi détendre l'atmosphère en utilisant la sonnerie d'un téléphone comme un running gag réjouissant. Mais un plan s'assombrira, épousant le caractère de l'instant d'un personnage. Un autre, filmé à travers le voile d'un rideau sera d'un bel onirisme. Cette sensation de glisser en permanence tout au long du film mène a une forme d'envoûtement.