Du réalisateur Thomas Vinterberg, on était en droit de s'attendre à une œuvre forte et réaliste à la Festen plutôt qu'à un sage et bâclé film ayant l'allure d'une production téléfilmesque BBC dans la basse moyenne. Et quand on a lu le magnifique roman du grand Thomas Hardy, une des plus belles et touchantes histoires d'amour de la littérature, on ne sait que mieux qu'il y avait très largement de la matière pour cela.
Le fait que le film soit loin d'être très fidèle à l'œuvre d'origine n'est pas très gênant (on peut trouver comme légitime excuse que le cinéaste ne voulait pas reproduire un film similaire à l'excellente version de John Schlesinger de 1967, qui est assez fidèle au livre !), par contre ce qu'il l'est plus c'est que l'ensemble soit incapable de prendre son temps (les 2 heures et cinquante minutes du Schlesinger étaient pleinement justifiées !) et d'ainsi aligner les rebondissements sans jamais les approfondir. Ce qui a pour résultat que Loin de la foule déchaînée version Vinterberg souffre d'une cruelle absence de profondeur et d'émotion et que certaines séquences, à l'instar du final, sont mal amenées.
L'interprétation, si on excepte Tom Sturridge, trop fade, loin du fascinant et félin Sergent Troy joué par Terence Stamp en 1967, sauve tout de même un peu les meubles. La sublime Carey Mulligan (qui a, au passage, une très belle voix !), une de mes stars actuelles favorites, joue une Bathsheba qui ne manque pas de fraîcheur, Matthias Schoenaerts est pleinement à l'aise avec la virilité teintée de timidité de Gabriel Oak, et Michael Sheen, malgré les défauts du film, réussit parfois à être émouvant en amoureux blessé.
Mais je m'attendais à beaucoup mieux. C'est une franche déception. Pour finir, je tiens particulièrement à déconseiller à ceux qui n'ont pas aimé le film et qui n'ont pas lu le livre de passer à côté de ce dernier car c'est une merveille, à laquelle d'ailleurs le Loin de la foule déchaînée version Schlesinger rend beaucoup mieux hommage.