Luchino Visconti livre avec ce métrage une fresque vraiment complète sur la personnalité complexe du roi Louis II de Bavière mécène dépensier et désintéressé de la politique. Ce denier avait affirmé "Je veux rester un mystère, pour moi-même et pour les autres". Indépendamment des dialogues profonds qui parsèment le film qui tente d'expliciter les pensées du personnage, le réalisateur parvient à conserver cette dose de mystère demeure sur le personnage historique (rendant la mort de son personnage autant énigmatique que dans l'Histoire). L'idée de ponctuer le métrage par des scènes où les personnages regardent directement la caméra comme s'il s'agissait d'une enquête, témoigne d'un respect scrupuleux des faits historiques par le cinéaste.


Déjà Helmut Berger ressemble vraiment aux portraits de Louis II de Bavière. Je n'ai jamais été autant troublé depuis le Napoléon joué par Albert Dieudonné. Berger est littéralement habité par son personnage et livre prestation d'une intensité peu commune. Romy Schneider quant a elle reprend pour une ultime foi son rôle de Sissi (après la trilogie très romantisé) dans un registre plus mature. Elle a aussi un jeu plus subtile et proche du portrait de l'impératrice. La ressemblance entre Trevor Howard et les portraits de Wagner est aussi saisissante. On retrouve également au casting : Silvana Mangano (Cosima von Bülow, puis Cosima Wagner), Gert Fröbe (père Hoffmann),

Helmut Griem (colonel Dürckheim), Izabella Teleżyńska (la reine-mère) Umberto Orsini (comte von Holstein) et John Moulder Brown (prince Otto). Il va sans dire que les acteurs ont tous été aidé par le maquillage et costumes du film qui sont justes parfaits.


Luchino Visconti a aussi posé sa caméra dans les liens emblématiques de la Bavière et de l'Autriche parmis lesquels la trinité des châteaux caprices de ce roi maudit : Château de Herrenchiemsee (sur Herrenchiemsee, une île du lac de Chiem), Châteaux de Hohenschwangau et de Neuschwanstein (à Schwangau) puis le Château de Linderhof (à Ettal, près d'Oberammergau). C'est aussi par ailleurs l'occasion de découvrir les pièces merveilleuses des différents édifices à travers les séquences de ce film, leur accessibilité étant difficile voir impossible pour les touristes aujourd'hui (exemple : Galerie des glaces copie de celle de Versailles à Herrenchiemsee, ainsi que bon nombre d'autres pièces de ce chateau avec des peintures murales fragiles car inachevée). On retrouve aussi la villa casino de l'île aux Roses (Lac de Starnberg), le Château de Nymphembourg et le Théâtre Cuvilliés (à Munich) ainsi que la Kaiservilla à Bad Ischl en Autriche. Visconti nous fait donc découvrir ces écrins palatiaux sous un voile tantôt brumeux, neigeux, pluvieux et par dessus tout nocturne, chose renforçant l'atmosphère enchanteresse/opératique de l'univers de roi de Bavière. C'est donc sans surprise que certains plans comme ceux des précédentes réalisations sont des véritables tableaux.


Rien à redire sur la musique d’accompagnement du film qui est complètement dans l'ambiance de l'univers du roi avec des opéras wagnériens (extraits de Lohengrin, Tristan und Isolde, Tannhäuser) et des morceaux de Robert Schumann (extraits des Scènes d'enfants).


Je recommande le visionnage de ce chef d’œuvre dans sa version intégrale de 3h58, le film ayant subi maintes censures en raison des séquences illustrant l'homosexualité du souverain (pourtant avérée et partie intégrante de sa personnalité).


Empereur-des-tortues
10

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le 6 sept. 2024

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