J'ai voulu revoir le film de Henry Koster seulement après avoir soigneusement relu le livre. Et j'ai apprécié le film car il est une magnifique illustration du livre.
Le film en effet est très fidèle au roman au point que parfois je devinais les répliques à venir. Et j'ai surtout pris plaisir à bien observer les deux acteurs principaux notamment aux points clés du roman, par exemple l'arrivée de Rachel dans la maison de Philip, en son absence ou encore le fameux repas d'anniversaire où Philip annonce son projet de mariage et où les visages des convives se recouvrent de stupeur ou bien encore la scène du collier de famille et l'explication entre Philip et son tuteur.
Le roman distille le chaud et le froid constamment au point que le lecteur, comme Philip, n'arrive pas à savoir si Rachel est coupable ou pas, vénéneuse ou pas. Un vrai bonheur d'incertitude pour le spectateur.
Si maintenant, je dis que Philip, c'est Richard Burton (27 ans) au début de sa carrière pour un rôle d'un jeune homme de 25 ans et que Rachel, c'est Olivia de Havilland (36 ans en 1952) à peu près aussi l'âge du rôle, on peut dire que Koster dispose du casting idéal.
Richard Burton, quelle présence à l'écran ! Mais il sait aussi la jouer très fine de la haine a priori à l'amour impossible
Olivia de Havilland est si belle et si douce dans son rôle qu'on ne peut que comprendre le personnage de Philip de tomber sous le charme. Elle a cependant dû accepter quelques fines ridules pour mieux accuser son âge face à la jeunesse fougueuse de Burton.
Une scène extraordinaire qui en dit long sur la qualité de la mise en scène. En préambule, dans le roman et dans la réalité, Burton est plus grand qu'Olivia de Havilland d'au moins une tête. C'est d'ailleurs un élément très fort dans le roman où Philip s'attendait à voir une femme aussi haute que lui. Quand il a vu que Rachel était petite (et mignonne), les reproches et critiques qu'il s'apprêtait à faire fondirent comme neige au soleil.
Et la scène à laquelle je voulais en venir montre Rachel s'occupant au premier plan d'un service à thé et Philip descendant un escalier à l'arrière-plan beaucoup plus petit (moitié hauteur de Rachel). Puis peu à peu, Philip s'approche et grandit jusqu'à atteindre la taille de Rachel. J'ai trouvé cette scène très significative des relations qui s'établissent entre Rachel et Philip.
D'ailleurs, d'une façon générale, la mise en scène du film est follement romantique dans ce bord de mer de Cornouailles balayé par les vents et les pluies avec une musique tour à tour passionnée, sensible, rêveuse propre à accentuer l'émotion du spectateur.
Les premières images du film correspondent à la première page du roman avec un pendu au "carrefour des quatre routes" qui avait assassiné son épouse. Tout comme dans le livre, elles ne sont pas anodines. Et ce carrefour réapparait à nombreuses reprises dans le film. Mais étrangement, à la fin, contrairement au roman, le scénariste n'a pas éprouvé le besoin d'en reparler. Seule la lecture du roman permet d'en faire le rapprochement.
Très bon film. Bien que tout soit parfaitement explicite dans le film, je pense que le roman est plus riche de détails et on profitera d'autant mieux du film qu'on aura lu le roman.