Voilà un film qui m'aura embarqué par sa bande originale - remarquable - et plus largement par son atmosphère vintage, restituant avec justesse et élégance cette période de la fin des années 60, et du virage vers la décennie suivante.
Entre la musique originale du groupe électro Nousdeuxtheband, et les vieux tubes de rock anglais ou de variété française, la réalisatrice Sylvie Verheyde réussit un sans-faute dans sa sélection musicale.
Dans le même ordre d'idée, il faut souligner la dimension discrètement érotique de ce "Madame Claude" 2.0. (près d'un demi-siècle après la version de Just Jaeckin avec Françoise Fabian).
Sans proposer un film sulfureux à proprement parler, Sylvie Verheyde parvient à instaurer une ambiance glamour empreinte de volupté, autour notamment de la jeune et sensuelle Garance Marillier (vue dans "Grave"), qui se lâche comme une grande à l'occasion de quelques scènes de sexe muy caliente (on signalera aussi une séance de ligotage pour Mylène Jampanoï).
C'est cette atmosphère envoûtante qui sauve le film lors de ses quelques temps faibles, permettant de compenser un scénario bancal, le principal défaut de "Madame Claude".
En effet, plusieurs pistes narratives sont amorcées (l'affaire Markovic, le banditisme, les amitiés politiques, le renseignement...) sans être réellement approfondies, et s'intègrent difficilement au sein d'un récit un peu fourre-tout.
J'imagine que c'est cette absence d'intrigue forte pour structurer le film qui explique ses notes très basses.
Il faut plutôt voir le film de Verheyde comme le tableau impressionniste d'une époque iconique, et le portrait d'une femme farouchement indépendante au temps du patriarcat.
Le choix de Karole Rocher pour le rôle-titre va dans ce sens, même si la gouaille et la flamboyance de la comédienne s'accordent mal avec la personnalité plus discrète de la véritable Fernande Grudet.
Si le casting apparaît prestigieux (Roschdy Zem, Benjamin Biolay...), l'interprétation s'avère assez inégale. On retiendra toutefois plusieurs séquences marquantes, comme le clash entre Claude et les deux félons (Hafsia Herzi et Paul Hamy), celui entre Sidonie et son père abusif (incarné par Philippe Rebbot, convaincant), ou encore la scène de séparation déchirante entre Claude et sa fille, venue lui annoncer sa grossesse.
J'ai bien conscience d'avoir un avis minoritaire, mais j'ai vraiment apprécié cette plongée dans la France pompidolienne, époque qui charrie tant de fantasmes...
En dépit de ses indéniables lacunes, cette nouvelle version de "Madame Claude" vaut donc mieux à mon avis que sa sinistre réputation.