En 2004, tout jeune cinquantenaire qu’il était, Villeret jouait un de ses derniers rôles, celui d’un grand-père tout près du ciel. En effet, le Mont Blanc n’est pas très loin, regardant sa cabane d’un air presque pas hautain. Et l’homme fait le poids devant les deux générations qui le suivent, et la tchatche embrouillée de son petit-fils : « et toi, tu préfères les chevals ou les jumentes ? »
Le décor manque un peu de profondeur, monté presque en 2D sur Villeret et Brasseur, en qui on avait confiance pour refaire le coup des voisins / ennemis d’enfance inséparables. Et que je te mets un bobsleigh, et un chasse-neige, et des autoneiges, et un treuil, et un hélico : une machinerie qui poppe sans un souci pour la réalité budgétaire (un aspect qui ne semble jamais atteindre les vieux dans leur indécrottable et plane gentillesse).
Pareil chez les enfants, dont un extrait de deux spécimens sur toute une classe suffit à Legrand pour prétendre toucher à l’amitié montagnarde, et pour justifier la proximité quasi-complice que tout ce beau monde entretient avec les chasseurs alpins. Difficile de ne pas regretter ces grandes crevasses, ces enjambements fainéants pour la solde de 400 coups qui laissent de glace.
C’est dans le (et la) symbolique qu’on récupère un peu de sa mise : des seconds rôles qui assument, eux, vraiment la charge de nous faire croire en Savoie (ce gardien du refuge m’a rappelé Brad Dourif dans Cerro Torre), des lapsus élémentaires mais drôles qui apportent un peu de soutien à l’idée qu’envoyer ce gamin au-dessus de Chamonix n’est pas démesurée, et une place laissée aux objets (le Tintin au Tibet joue bien le rôle qu’il signifie pour l’enfant) qui entretiennent le lien vivant entre l’environnement et la vie qui passe, lentement et froidement, broyant les naïvetés de l’enfance. Comme un glacier.
Quantième Art