Évacuons tout de suite les défauts de ce film, qui en a peu : un très léger passage à vide dans le tout dernier mouvement de l'histoire (dix minutes de moins aurait sans doute permis de l'éviter), un plan final absolument inutile sur le fond comme sur la forme (le générique tombait vingt secondes plus tôt et on tenait une fin puissante) et une Emilie Dequenne qui manque un peu de naturel au début - la faute aux dialogues, qui laissent un moment craindre une certaine maladresse dans l'écriture.
Rien de fondamental qui ne vienne gâcher le plaisir que provoque ce vrai bon petit film en forme de fable sociale douce-amère. La photographie patine agréablement des décors étonnamment doux et chaleureux pour un film dont le plus gros de l'action se déroule au sein d'une société d'assurances, le casting est excellent et tous les nombreux personnages balancent fort joliment sur un fil non manichéen, parvenant toujours à toucher, même lorsqu'ils sont peu sympathiques, voire franchement médiocres (Camille Chamoux et sa collègue, savoureuses dans leur bêtise méchante de bureau).
A travers le regard forcément naïf et plein d'humanité d'une jeune adolescente qui découvre le monde de l'entreprise lors d'un stage effectué dans la boîte où travaille sa mère, Marc Fitoussi dresse le tableau cocasse et cruel de la vie en entreprise, avec son lot d'humiliations, de compromissions, d'ennui, de mesquineries, de malversations, de ragots et de dépressions. Comme une comédie sans cesse menacée par des drames ordinaires, le film joue sur un équilibre fragile qu'il maintient tout du long avec une élégance certaine.
Lors d'une vibrante scène finale sans dialogues (si l'on oublie donc le plan de vingt secondes qui suit et qui viendrait presque la gâcher tant il n'apporte rien à l'affaire), la jeune fille crie sans qu'on l'entende, Cassandre ne parvenant pas à avertir ses pairs de l'avenir désespéré et désespérant qui les attend. Celui de la vie d'adulte.