Adaptation du livre autobiographique de Christina,fille adoptive de Joan Crawford.Hollywood,fin des années 30.Lucille Le Sueur,alias Joan Crawford,star de cinéma,ne peut pas avoir d'enfant et décide d'en adopter.Les services sociaux,qui estiment incompatibles l'éducation d'un enfant avec la moralité douteuse et la vie agitée de l'actrice,lui opposent une fin de non-recevoir.Ca peut paraître réac,mais la suite prouvera qu'ils avaient bien raison,les services sociaux.Quoi qu'il en soit,Crawford va quand même se voir confier un bébé,puis trois autres plus tard.Eh oui,c'est comme ça,si on est riche et célèbre on fucke la loi et on peut tout s'offrir,y compris des enfants.Et c'est encore ainsi de nos jours,n'est-ce pas?Donc,la star récupère une petite fille,laquelle entame alors un long chemin de croix.Au-delà des brutalités infligées,la comédienne va s'ingénier à briser mentalement la gamine,qu'elle va engueuler,brimer,rabaisser,humilier et pour finir déshériter,le pire étant que la petite aimera toujours sa mère malgré tout et cherchera inlassablement à atteindre l'inaccessible but de la satisfaire.Il est clair que Christina aurait été plus heureuse dans une famille modeste mais normale et équilibrée,loin du luxe hollywoodien.Mais plus que le révoltant destin de Christina,le sujet du film est surtout Joan,cette "maman très chère".Elle est déjà un condensé de toutes les tares inhérentes semble-t-il à la condition de star.Egocentrique,alcoolique,maniaco-dépressive,en perpétuelle représentation,même dans le privé,obnubilée par le paraître et par sa carrière,nymphomane,bien que cet aspect soit éludé dans le film,le package habituel,quoi.Mais c'est pas tout,mais c'est pas tout,comme le chantait Bourvil,car elle est en outre une véritable psychopathe pleine de TOC,obsédée par la propreté,l'ordre et la discipline.La maman idéale en somme.Le scénario permet toutefois de comprendre les fondements de cette monstrueuse personnalité.Joan Crawford est issue d'un milieu pauvre,a eu une jeunesse difficile,a dû se battre seule pour arriver au sommet et est angoissée par la terreur de ne plus plaire,de vieillir,de descendre la pente et finalement de perdre tout ce qu'elle a construit.D'autant plus qu'elle est consciente de n'être au fond qu'un pion manipulé dans un système gouverné par les producteurs.La scène lors de laquelle Louis B. Mayer la vire de la MGM est éloquente à ce propos.On le voit,il y avait là un sujet passionnant.Malheureusement,le film est passablement raté.La reconstitution d'époque est vieillotte,à la manière d'un mauvais mélo des années 40.La mise en scène est figée,empesée,compassée,et entre deux pétages de plomb de Joan le temps parait long.Les couleurs,entre tons trop vifs et pastels écoeurants,sont à gerber,et la musique est grandiloquente et saoûlante.L'utilisation comme décor quasi unique de l'immense villa de Brentwood confère en sus à l'ensemble un côté théâtre filmé qui n'est pas du meilleur effet.Quant à la narration,elle est flinguée par les ellipses qui tuent.Certes,raconter en deux heures une histoire qui s'étale sur plus de trente ans n'est pas facile mais beaucoup de productions y sont brillamment parvenues.Là,c'est carnaval!On voit Crawford rencontrer une fonctionnaire qui l'informe qu'il est hors de question de lui confier un gosse et on enchaîne direct dans la scène suivante avec l'arrivée du bébé chez la star.Sans transition,comme on dit.Le passage de Christina de l'enfance à l'adolescence ou la mort du mari de Joan sont également assez abrupts.Et que dire de Christopher,le deuxième enfant adopté,qu'on aperçoit vite fait deux ou trois fois,puis qui disparait complètement du film pour revenir à la fin,à l'enterrement de sa mère.Où était-il passé tout ce temps?Qu'en était-il de la façon dont il était traité?A-t-il servi de souffre-douleur comme sa soeur?Et si non,pourquoi?Quant aux jumelles parachutées plus tard au sein de cette belle famille,non seulement on ne les verra pas,mais leur existence ne sera même jamais évoquée.Il existe peut-être des scènes coupées qui combleraient en partie ces trous béants,mais tel quel le montage est catastrophique.Reste Faye Dunaway qui,très investie dans le rôle de Joan,livre une grosse performance,bien aidée par un beau travail des maquilleurs et des coiffeurs, atteignant une troublante ressemblance avec la star disparue.La morale de l'histoire,c'est qu'il faut savoir séparer l'image publique des vedettes et leur personne privée.Joan Crawford était une formidable comédienne et il est logique d'apprécier son travail,mais elle a trompé ses admirateurs toute sa vie en présentant l'illusion de la mère parfaite entourée d'enfants épanouis.