Enfin, j'ai pu revoir ce film "Mayrig" (et sa suite "588, rue Paradis") dont il semble impossible à l'heure actuelle de se procurer les DVD ( à un prix raisonnable). Enfin, j'ai pu revoir ces films grâce à l'heureuse idée d'une contributrice de Sens Critique que je remercie encore !
Je n'avais vu ces deux films qu'une fois à la télévision dans les années 90 (environ) et avais alors été impressionné par la force évocatrice que porte ce film. Je me désolais de ne pouvoir les revoir ...
Henri Verneuil, de son vrai nom, Achod Malakian, raconte les souvenirs de son arrivée en France très jeune avec sa famille rescapée des atrocités perpétrées par les turcs sur le peuple arménien.
Je ne sais pas dans quelle mesure, l'histoire est arrangée ou romancée, mais cela n'a qu'une importance très relative. Ce que je veux retenir, c'est l'hommage rendu à travers ce film au courage et à la ténacité que bien des familles arméniennes ont eu à développer pour s'adapter et s'intégrer dans une société (ici française) au mieux indifférente et parfois hostile.
Le film mélange adroitement l'Histoire du génocide arménien avec des images quasi insoutenables et l'histoire du petit Azad Zakarian à Marseille. Parce qu'on ne peut dissocier les deux et parce que l'histoire du petit Azad prend forcément racine dans l'Histoire.
J'aime beaucoup dans ce film l'émotion pure qui jaillit de cette famille, d'une solidarité sans faille, composée du père et de la mère d'Azad et des deux tantes célibataires qui seront surnommées "la trinité de mères".
J'aime surtout beaucoup l'aspect constamment positif des personnages qui croient en la vertu du travail pour se sortir de l'ornière. En particulier, le père qui se refuse à vouloir évoquer et regretter une vie antérieure confortable qu'il remise dans les souvenirs afin de ne voir que l'avenir.
D'un point de vue réalisation Henri Verneuil a mis les petits plats dans les grands notamment en soignant la reconstitution des rues de Marseille des années 1920 qui est très convaincante. On sent que Verneuil a mis une part de lui-même dans ce film qui clôture une superbe carrière.
Le film est monté à l'aide de nombreux flash -back enrichissant l'instant présent avec des images ou des souvenirs ou encore des propos historiques. Parce que, toujours, le présent ne se comprend ou ne se conçoit qu'à travers le passé.
Le casting, c'est d'abord une voix off qui baigne l'ensemble du film et qui est assurée par Richard Berry qui sera Azad adulte et qu'on verra physiquement dans la suite "588, rue Paradis".
Omar Sharif tient le rôle d'Hagop Zakarian, le père. Il est excellent dans un rôle de "pater familias" philosophe dont le seul centre d'intérêt, la seule chose qui compte est l'avenir de son fils.
La mère d'Azad, c'est une Claudia Cardinale qui joue le beau rôle tout en nuance d'une mère au cœur tendre et plein de délicatesse.
Une des tantes d'Azad, Gayané, est jouée par Nathalie Roussel (qui avait joué quelques années plus tôt l'adorable mère de Pagnol dans "la gloire de mon père" et "le château de ma mère" d'Yves Robert).
L'autre tante d'Azad, c'est Isabelle Sadoyan, très convaincante dans un rôle de "mamma" dévouée corps et âme à la famille.
"Mayrig", qui est le mot arménien signifiant Maman, est un beau film bourré d'émotion et sûrement de reconnaissance d'un réalisateur de talent qui ose faire un retour sur lui-même et ses origines.