Portés par les eaux troubles du Mekong, les personnages explorent désirs, ivresse et précarité dans une même quête mouvante aux circuits aléatoires. Des bords du fleuve aux lumières d'une discothèque, de la forêt de mangroves aux terrasses animées, tous sens aux aguets, Mekong stories nous baigne dans les ambiances chaudes et humides d'un Vietman dont la douceur de vivre est un leurre et la rudesse une réalité.
Plongée sensuelle dans le désir et le déni, les troubles nés d'étreintes viriles, d'envies folles, de puissantes ivresses, sublime visuellement, le film est un rêve comme le serait un voyage, un récit dans lequel on se perd avec plaisir, plongeant pour revenir à la surface, s'enivrant pour tout oser.
Étonnant doux même lorsqu'il peint la violence, porté par la folle soif de vivre du personnage principal, Vu, jeune photographe que son père veut marier de force alors qu'il aime Thang (faux grand frère et vrai protecteur) et qu'il voudrait être Van (la belle danseuse souvent si seule), Mekong stories est film de chairs, de boues, de peaux humides, de corps audacieux prenant des coups, se relevant, s'offrant à d'autres, s'entremêlant.
C'est un film d'une grande bienveillance, une œuvre de batailles et de survie, une course poursuite aux pauses salutaires, vivant, charnel et généreux. La caméra de Phan Dang Di trouve à chaque fois la bonne distance, le montage venant souvent apaiser les douleurs, passant à autre chose, imposant de subtils inserts.
Les comédiens amateurs et professionnels donnent corps au récit presque choral d'un groupe de jeunes gens aux aspirations communes. Il s'agit de vivre, se débrouiller, avancer tant bien que mal dans un pays en pleine mutation. Grand admirateur de Tsai Ming Liang, Phan Dang Di est un cinéaste à suivre !